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7 décembre 2010 2 07 /12 /décembre /2010 00:59

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L’ONU a décidé,  le vendredi 3 décembre, de consacrer une séance de l’Assemblée générale à l’analyse de l’épidémie de choléra dans ce pays frère. Initiative prometteuse. Elle servira sûrement à avertir l’opinion de la gravité de la situation et à mobiliser la communauté internationale en faveur du peuple haïtien. Après tout, la raison d’être de l’ONU est de se colleter avec les problèmes et de promouvoir la paix.

Oui, la situation en Haïti est grave, et l’aide requise n’est pas grand-chose. Notre monde turbulent dépense tous les ans 1,5 billion de dollars en armes et en guerres ; le relèvement et le développement d’Haïti – où le brutal séisme de début d’année a fait 250 000 morts, 300 000 blessés et des destructions énormes – exigent, selon des calculs d’experts, 20 milliards de dollars, soit 1,3 p. 100 de cette somme.

Mais, pour l’instant,  il ne s’agit pas de ça, qui n’est qu’un simple rêve. L’ONU ne réclame pas seulement une modeste aide économique, qui pourrait être dégagée en quelques minutes, mais aussi 350 médecins et 2 000 personnels infirmiers que les pays pauvres ne possèdent pas et que les pays riches leur enlèvent généralement. Cuba a répondu aussitôt, offrant trois cents médecins et personnels infirmiers. Notre Mission médicale cubaine en Haïti traite presque 40 p. 100 des cholériques. Aussitôt après l’appel de l’organisation internationale, elle s’est attachée à dépister les causes concrètes de la mortalité élevée dans les centres sanitaires dont elle n’est pas responsable – 3 p 100 – alors qu’elle est inférieure à 1 p. 100 et qu’elle continuera de diminuer dans les centres dont elle s’occupe.

Par ailleurs, il est évident que les 1 800 victimes mortelles recensées officiellement à ce jour n’incluent pas celles qui meurent sans l’assistance de médecins hors des centres de santé.

Nos médecins des centres de lutte contre le choléra ont constaté que les cas les plus graves provenaient des sous-communes les plus distantes et les plus isolées : Haïti est un pays montagneux où l’on n’accède à certains endroits que par des chemins escarpés.

Le pays compte 140 communes urbaines et rurales, et 570 sous-communes. Selon les calculs du pasteur protestant de l’une de ces sous-communes isolées, où vivent environ 5 000 habitants, 20 étaient morts du choléra sans être allés à un centre de santé.

D’après les recherches urgentes faites par la Mission médicale cubaine en coordination avec les autorités sanitaires, 207 sous-communes les plus isolées n’ont pas accès à ces centres de lutte contre le choléra ou à l’assistance médicale.

À la séance des Nations Unies susmentionnée, l’Assemblée générale a ratifié le chiffre avancée par Mme Valérie Amos, secrétaire générale adjointe chargée des questions humanitaires, qui a visité d’urgence Haïti pendant deux jours et a calculé qu’il fallait 350 médecins et 2 000 personnels infirmiers de plus. Il fallait connaître les ressources humaines existant dans le pays afin de pouvoir calculer les besoins supplémentaires. Un facteur qui dépend aussi des jours et des heures que le personnel correspondant consacre à la lutte contre l’épidémie. En fait, les horaires de travail jouent un rôle important : l’analyse de la mortalité élevée a permis de constater que 40 p. 100 des cholériques décédaient dans la nuit, ce qui prouve que les patients ne reçoivent pas la même attention à ce moment-là.

Notre Mission estime qu’une utilisation optimale du personnel permettrait de réduire cette mortalité. En mobilisant les ressources humaines de la brigade Henry Reeve et les diplômés de l’Ecole latino-américaine de médecine de La Havane, la Mission médicale cubaine est convaincue qu’il est possible, même au milieu des énormes difficultés et destructions causées par le séisme, le cyclone, les pluies imprévisibles et la pauvreté, de maîtriser l’épidémie et de sauver la vie de milliers de personnes qui mourraient inexorablement dans les circonstances actuelles.

Les élections visant à renouveler la présidence, la totalité de la Chambre des représentants et une partie du Sénat se sont déroulées dimanche 28 novembre, un moment tendu et complexe qui nous a inquiétés sérieusement compte tenu de l’épidémie et de la situation traumatique du pays.

Le secrétaire général de l’ONU a affirmé le 3 décembre, selon une agence de presse européenne importante : « Je presse instamment tous les acteurs politiques, quelles que soient leurs plaintes ou leurs réserves au sujet des élections, à s’abstenir de recourir à la violence, à en discuter sur-le-champ et à trouver une solution avant que n’éclate une crise sérieuse. » Et il a exhorté la communauté internationale à fournir les 80 p. 100 restants des 164 millions de dollars promis.

Il est incorrect de chapitrer un pays comme on gronde un enfant. Haïti a été le premier pays du sous-continent à liquider l’esclavage voilà deux siècles. Elle a été victime de toutes sortes d’agressions coloniales et impérialistes. Elle a été occupée par les USA voilà à peine six ans, après qu’on y ait fomenté une guerre fratricide. Qu’elle soit occupée par des troupes étrangères au nom des Nations Unies ne la prive pas du respect que méritent sa dignité et son histoire.

J’estime en revanche correcte l’exhortation lancée par le secrétaire général aux citoyens haïtiens pour qu’ils évitent les affrontements entre eux. Le 28, dans la matinée, les partis d’opposition avaient signé un appel à des protestations, ce qui avait provoqué des manifestations et une confusion notable dans le pays, en particulier à Port-au-Prince, et surtout à l’étranger. Le gouvernement et l’opposition ont toutefois évité des actes violents. Le lendemain, le calme régnait.

Selon la même agence européenne,  Ban Ki-moon a affirmé, au sujet de ces élections, que « les "irrégularités" enregistrées "semblent avoir été plus sérieuses que ce qu’on pensait au début". »

Quand on a lu les informations en provenance d’Haïti et les déclarations postérieures des principaux candidats de l’opposition, on a du mal à comprendre pourquoi celui qui avait appelé à éviter les luttes fratricides après la confusion causée parmi les électeurs déclare maintenant, à la veille de l’annonce des résultats qui détermineront les deux candidats aux élections de janvier, que les problèmes étaient plus graves qu’il ne pensait, ce qui revient à jeter de l’huile sur le feu des antagonismes politiques.

Hier, 4 décembre, la Mission médicale cubaine a fêté douze ans de présence en Haïti où, depuis, des milliers de médecins et de techniciens de la santé publique ont prêté service, vivant au milieu de son peuple en temps de paix ou de guerre, de séisme et de cyclone. Et elle y vivra en ces temps d’intervention, d’occupation et d’épidémie.

Le président haïtien, les autorités centrales et locales, quelles que soient leur convictions religieuses ou politiques, savent qu’elles peuvent compter sur Cuba.

 

Fidel Castro Ruz

Le 5 décembre 2010

20 h 12

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2 décembre 2010 4 02 /12 /décembre /2010 09:59

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  Il a y bien des choses dont il faudrait parler aujourd’hui que les États-Unis sont plongés dans un énorme scandale à la suite des documents publiés par WikiLeaks dont personne – quelles que soient les motivations de ce site web – ne met en doute l’authenticité.

 

Notre pays, toutefois, prend part à une bataille contre le choléra en Haïti, lequel devient une menace pour les autres peuples d’Amérique latine et d’autres du Tiers-monde.

 

C’est alors que le pays souffre encore les conséquences d’un séisme qui a tué ou blessé presque un demi-million de personnes et causé des destructions énormes que l’épidémie s’est déclenchée, aggravée presque aussitôt par le passage d’un cyclone.

 

            On comptabilisait hier, 29 novembre, 75 888 cholériques, dont 27 015 ont été traités par la Brigade médicale cubaine qui a enregistré 254 décès, soit 0,94 p. 100.

 

            Les autres installations hospitalières publiques, des ONG et privées ont traité 48 875 cholériques, dont 1 467 sont décédés, soit 3,0015 p. 100.

 

            Aujourd’hui, 30 novembre, la Mission médicale cubaine qui compte dans ses rangs, soit dit en passant, 201 diplômés de l’École latino-américaine de médecine, a traité 521 patients, soit un total de 27 536.

 

            Dimanche dernier, 28 novembre, dix-huit personnes provenant d’une sous-commune appelée Plateau sont arrivées dans un état très critique au Centre de traitement du choléra de l’hôpital de référence communautaire situé dans la commune L’Estère, dans le département d’Artibonite, et ont été aussitôt traités par les onze médecins et les douze infirmières de la Brigade médicale cubaine qui y travaille et qui, heureusement, a pu leur sauver la vie à tous.

 

Le lendemain, lundi 29, onze autres personnes, dont un enfant de cinq ans dont les parents étaient morts du choléra, sont arrivées de cette même sous-commune. De nouveau, leurs vies ont été sauvées.

 

Compte tenu de cette situation, le docteur Somarriba, chef de la Mission médicale, a décidé d’envoyer dans cette sous-commune cinq médecins, deux infirmières, un infirmier et un rééducateur à bord d’un véhicule tout terrain avec toutes les ressources requises pour traiter les cas d’urgence.

 

Quatre des cinq médecins sont diplômés de l’ELAM : une Uruguayenne, un Paraguayen, un Nicaraguayen et un Haïtien. Le cinquième est le chef de la brigade cubaine dans le département d’Artibonite.

 

Pour atteindre cette sous-commune, ils ont fait six kilomètres en voiture, six kilomètres à pied sur une route non goudronnée et deux autres kilomètres sur un terrain escarpé, transportant eux-mêmes les équipements et les ressources.

 

Plateau, située entre cinq montagnes, compte environ cinq mille habitants extrêmement pauvres vivant dans de modestes maisons regroupées à trois endroits et se consacrant essentiellement à la culture des arachides, du millet, des haricots noirs et de la calebasse. Selon les informations reçues, il n’y a pas de rues, pas d’électricité, pas de magasins, mais un temple protestant.

 

Quand l’équipe est arrivée à Plateau, le pasteur protestant s’est offert à organiser dans le temple même un centre de traitement, avec six lits pliants et quatre bancs, ce qui permettait d’accueillir d’urgence dix personnes.

 

Huit, dont trois en état critique, ont été admis aujourd’hui.

 

Les habitants ont fait savoir qu’une vingtaine de personnes étaient décédées, des chiffres qui n’apparaissent pas sur les listes officielles. Le soir, notre équipe va travailler avec les lampes-tempête qu’elle a apportées.

 

La mission a décidé d’ouvrir dans cette communauté reculée un Centre de traitement du choléra qui comptera vingt-quatre lits. Les ressources arriveront demain, dont un groupe électrogène.

 

Les opérateurs de télévision sont aussi arrivés à l’endroit en apprenant la nouvelle.

 

Aucun décès n’a été enregistré aujourd’hui. Un autre centre a été ouvert un peu plus au nord, soit un total de trente-huit centres et unités de traitement du choléra.

 

Je raconte ce cas pour expliquer les circonstances dans lesquelles on travaille et les méthodes employées pour lutter contre l’épidémie qui, à raison de dizaines de morts par jour, aura bientôt fait deux mille victimes.

 

Compte tenu des méthodes de soin employées et des renforts en personnel prévus, il sera plus difficile que le nombre de décès progresse au même rythme.

 

Comme je sais les passions que les élections soulèvent traditionnellement – sans parler des abstentions qui caractérisent beaucoup d’entre elles – je redoutais qu’il ne se passe quelque chose en Haïti au milieu des destructions et de l’épidémie. L’un des principes de nos missions médicales et de la brigade Henry Reeve est le respect absolu des lois, des partis et des convictions religieuses des pays où elles opèrent.

 

Mon inquiétude provenait du fait que les informations des médias internationaux donnaient l’impression d’un panorama de violence généralisée, qui était pourtant loin de la réalité. Les observateurs internationaux se sont étonnés de ce genre de nouvelles alors que les faits correspondants ont été isolés et n’ont touché qu’un pourcentage réduit d’électeurs.

 

Les dirigeants qui avaient appelé le peuple à descendre dans la rue ont compris qu’il n’était pas correct, au milieu de la situation tragique du pays, d’engager des actions qui pouvaient provoquer des affrontements violents et interdire de contrôler et de vaincre l’épidémie. Si on n’y parvient pas, le choléra pourrait devenir endémique et causer une catastrophe sanitaire en Haïti et être une menace permanente pour les Caraïbes et pour l’Amérique latine où des millions de pauvres  s’entassent toujours plus dans les grandes villes, ainsi que pour bien d’autres nations pauvres d’Asie et d’Afrique.

 

N’oublions jamais qu’Haïti doit par ailleurs être reconstruite depuis ses fondations avec  l’aide et la coopération de tous. C’est ce que nous espérons pour son peuple noble et dévoué.

 

 

Fidel Castro Ruz

Le 30 novembre 2010

21 h 34

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30 novembre 2010 2 30 /11 /novembre /2010 00:42

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Réflexions de Fidel : HAÏTI : SOUS-DÉVELOPPEMENT ET GÉNOCIDE

Hier, j’ai informé que 1 523 personnes étaient déjà décédées du choléra en Haïti et j’ai expliqué les mesures adoptées par notre parti et  notre gouvernement.

Je ne pensais pas écrire aujourd’hui sur ce point, mais je me suis pourtant décidé à rédiger de courtes Réflexions.

Le docteur Lea Guido, représentante de grande expérience de l’OPS et de l’OMS à Cuba et en Haïti, a affirmé hier après-midi que, compte tenu des circonstances régnant en Haïti, on calculait que l’épidémie toucherait 400 000 personnes.

De son côté, le vice-ministre cubain de la Santé et chef de la Mission médicale cubaine, notre ambassadeur en Haïti et d’autres compagnons de la Mission se sont réunis toute la journée avec le président René Préval, avec le docteur Lea Guido, avec le ministre haïtien de la Santé et avec d’autres fonctionnaires des deux pays pour élaborer des mesures à appliquer d’urgence.

La Mission médicale cubaine, qui s’occupe déjà de trente-sept centres où elle a soigné à ce jour 26 040 personnes atteintes de choléra, recevra le renfort immédiat de la Brigade Henry Reeve, ce qui permettra d’ouvrir douze centres de plus (soit un total de quarante-neuf) et de préparer mille cent nouveaux lits, dans des tentes conçues et fabriquées dans ce but en Norvège et dans d’autres pays, et déjà achetées grâce aux fonds de lutte contre le séisme que le Venezuela a fournis à Cuba pour relever le système de santé haïtien.

Le docteur Somarriba a donné une nouvelle encourageante aujourd’hui en fin d’après-midi : ces sept derniers jours, aucun malade n’est décédé de choléra dans les centres pris en charge par la Mission médicale cubaine. Il sera impossible de maintenir un tel indicateur, car d’autres facteurs peuvent influencer ces résultats, mais cela offre une idée très réconfortante de l’expérience acquise, des méthodes adéquates et du dévouement de notre personnel médical.

Nous nous réjouissons aussi que le président René Préval, dont le mandat conclut le 16 janvier prochain, ait décidé de convertir la lutte contre l’épidémie en l’activité la plus importante de sa vie, une idée bénéfique au peuple haïtien dont héritera le prochain gouvernement.

 

 

Fidel Castro Ruz

Le 27 novembre 2010

21 h 56

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27 novembre 2010 6 27 /11 /novembre /2010 19:25

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Voilà quelques mois, le 26 juillet 2010, Lucius Walker, le dirigeant de l’organisation étasunienne, Pasteurs pour la paix, m’avait demandé durant une rencontre avec des intellectuels et des artistes cubains quelle serait la solution des problèmes d’Haïti.

Je lui ai répondu sans tarder : « Dans le monde actuel, Lucius, il n’y a pas de solution ; dans l’avenir dont je parle, oui. Les États-Unis sont de gros producteurs d’aliments, ils pourraient en fournir à deux milliards de personnes, ils seraient capables de bâtir des maisons résistant aux séismes… le problème est la façon dont les ressources sont distribuées.  Au territoire haïtien, il faut lui restituer jusqu’aux forêts.  Dans l’ordre des choses actuel, il n’y a pas de solution pour ce pays. »

Lucius parlait des problèmes de ce pays montagneux, surpeuplé, déforesté,  sans bois de feu, sans communications et sans industries, souffrant d’un analphabétisme élevé et de maladies comme le sida, et occupé par les troupes des Nations Unies.

J’ai ajouté : « Quand les circonstances changeront, vous pourrez vous-mêmes, Lucius, apporter des aliments des USA en Haïti. »

Le noble et humanitaire dirigeant des Pasteurs pour la paix décédait à peine un mois et demi plus tard, le 7 septembre, octogénaire, léguant la semence de son exemple à de nombreux Étasuniens.

La nouvelle tragédie n’était pas encore apparue, l’épidémie de choléra, qui, dès le 25 octobre, avait déjà touché plus de trois mille personnes. À cette dure calamité, il faut ajouter le cyclone qui, le 5 novembre, frappait Haïti, provoquant des crues et des inondations.

Cet ensemble de circonstances dramatiques mérite qu’on lui prête attention.

Le choléra est apparu pour la première fois dans l’histoire moderne en 1817, devenant l’une des grandes pandémies du XIXe siècle qui provoqua une grande mortalité, surtout en Inde. L’épidémie reparut en 1826, frappant l’Europe, dont Moscou, Berlin et Londres, et gagnant notre continent entre 1832 et 1839.

En 1846, une nouvelle épidémie encore plus nocive frappa trois continents : l’Asie, l’Afrique et l’Amérique, s’y répétant durant tout le reste du siècle. Pourtant, durant presque tout le XXe siècle, les pays latino-américains et caribéens se virent libérés de cette maladie jusqu’au 27 janvier 1991 où elle reparut à Chancay, un port du nord du Pérou, pour s’étendre d’abord le long des côtes du Pacifique, puis de celles de l’Atlantique, à seize pays, touchant 650 000 personnes en six années.

L’épidémie, pas de doute, touche bien plus les pays pauvres dont la population urbaine s’entasse dans des quartiers privés bien souvent d’eau potable à laquelle se mêlent par ailleurs les eaux usées, porteuses du vibrion cholérique qui cause cette maladie.

Dans le cas spécial d’Haïti, le tremblement de terre a détruit, là où ils existaient, les réseaux de ces deux types d’eau, et des millions de personnes vivent sous la tente à des endroits qui manquent bien souvent de latrines, et tout se mêle.

L’épidémie qui a touché notre continent en 1991 à partir de Chancay était le vibrion cholérique 01, biotype El Tor, sérotype Ogawa.

Jon K. Andrus, directeur adjoint de l’Organisation panaméricaine de la santé, a informé que c’était précisément la bactérie présente en Haïti. Il en découle une série de circonstances dont il faut tenir compte et qui détermineront le moment venu des considérations importantes.

Cuba, on le sait, forme d’excellents médecins haïtiens et prête des services de santé à ce pays frère depuis de nombreuses années. Il existait dans ce domaine des problèmes très sérieux, mais on avançait sans aucun doute. Personne ne pouvait imaginer, faute d’antécédents, qu’un tremblement de terre tuerait plus de 250 000 personnes et causerait une quantité incroyable de blessés et d’invalides. Nos médecins internationalistes ont redoublé d’efforts face à ce coup inattendu et se sont consacrés à leur mission sans relâche.

C’est au beau milieu de cette dure catastrophe naturelle que l’épidémie de choléra a frappé voilà à peine un mois avec beaucoup de force, puis, dans ces circonstances défavorables, le cyclone.

Devant la gravité de la situation, Valérie Amos, secrétaire générale adjointe des Nations Unies, chargée des questions humanitaires, a affirmé hier qu’il fallait 350 médecins et 2 000 infirmières de plus pour faire face à l’épidémie.

La fonctionnaire a lancé un appel pour étendre l’aide au-delà de Port-au-Prince et révélé que les livraisons de savon et d’eau potable ne parvenaient qu’à 10 p. 100 des familles installées hors de la capitale, bien qu’elle n’ait pas précisé à combien elles parvenaient dans cette ville.

Différents fonctionnaires des Nations Unies ont regretté ces derniers jours que la communauté internationale ait si mal répondu à la demande d’aide formulée pour faire face à la situation, au point de n’avoir fourni que 10 p. 100 des 164 millions de dollars réclamés d’urgence.

Selon une agence de presse, « Amos a demandé une réaction rapide et urgente pour éviter de nouvelles victimes du choléra ».

D’après une autre agence, « 1 523 Haïtiens sont déjà morts, 66 593 ont été touchés, tandis que plus d’un million d’habitants continue de vivre en plein air ».

Presque 40 p. 100 des malades ont été soignés par la Brigade médicale cubaine qui compte 965 médecins, personnels infirmiers et techniciens, et qui est parvenue à réduire le nombre de décès à moins de 1 p. 100. Compte tenu de ce niveau de soins, le nombre de décès ne devrait pas dépasser 700. Les personnes décédées étaient en règle générale extrêmement affaiblies par la dénutrition ou des causes semblables. Quand la maladie est dépistée à temps, les enfants meurent rarement.

Il est extrêmement important d’éviter que l’épidémie s’étende à d’autres pays latino-américains et caribéens, car elle y causerait dans les circonstances actuelles des dommages énormes.

Il faut chercher des solutions efficaces et rapides dans la lutte contre cette épidémie.

Notre parti et notre gouvernement ont décidé aujourd’hui de renforcer la Brigade médicale cubaine en Haïti par un contingent de la brigade Henry Reeve composé de 300 médecins, personnels infirmiers et techniciens de la santé, ce qui portera le total de nos coopérants à plus de 1 200.

Raúl, en visite en province, était parfaitement au courant de tout.

Le peuple, le parti et le gouvernement de Cuba seront une nouvelle fois à la hauteur de leur histoire glorieuse et héroïque.

 

Fidel Castro Ruz

Le 26 novembre 2010

21 h 58

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27 novembre 2010 6 27 /11 /novembre /2010 14:17

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Une réunion insolite s’est déroulée au Capitole de Washington entre des législateurs de la droite fasciste étasunienne et des dirigeants de la droite oligarchique et putschiste latino-américaine, qui ont parlé ouvertement du renversement des gouvernements vénézuélien, bolivien, équatorien et nicaraguayen.

Et ce, quelques jours avant la Conférence des ministres de la Défense des pays du continent, qui s’est tenue à Santa Cruz (Bolivie), et où le président Evo Morales a prononcé une dénonciation énergique le 21 novembre.

Il ne s’agissait pas en fait d’une simple campagne médiatique de calomnies – habituelle en politique impérialiste – mais bel et bien d’une conspiration qui, si elle aboutissait, plongerait inévitablement le Venezuela dans un bain de sang.

Compte tenu de ma longue expérience, je n’ai pas le moindre doute de ce qu’il se passerait au Venezuela si Chávez était assassiné. Pas la peine d’un plan ourdi d’avance contre le président : il suffirait d’un malade mental, ou d’un consommateur habituel de drogue, ou de la violence déclenchée par le trafic de drogues dans les pays latino-américains pour engendrer au Venezuela un problème extrêmement grave. Analysées d’un point de vue politique, les activités et les mœurs de l’oligarchie réactionnaire propriétaire de puissants médias, stimulée et financée par les États-Unis, conduiraient forcément à des heurts sanglants dans les rues du pays, ce qui est clairement l’intention de cette droite vénézuélienne porteuse de haine et fautrice de violence à la vue de tous.

Guillermo Zuloaga – propriétaire d’une chaîne de télévision opposée à la Révolution bolivarienne et fuyard de la justice vénézuélienne – participait à cette réunion de législateurs conspirateurs  convoquée par Connie Mack et par Ileana Ros-Lehtinen. Celle-ci est d’origine cubaine et d’obédience batistienne, et notre peuple lui a appliqué le sobriquet de « louve féroce » pour sa conduite répugnante durant l’enlèvement du petit Elián González et son refus de rendre l’enfant à son père. Cette représentante républicaine, qui suinte par tous les pores de sa peau la haine et le ressentiment contre Cuba, le Venezuela, la Bolivie et les autres pays de l’ALBA, qui a défendu le gouvernement putschiste au Honduras que la majorité des pays américains ont pourtant condamné, sera presque sûrement élue au prochain Congrès présidente de la commission des Relations extérieures de la Chambre des représentants.

Le gouvernement de la République bolivarienne faisait donc face à une grave provocation. C’était un point vraiment délicat. Je me demandais comment Chávez réagirait. La première riposte énergique est partie d’Evo Morales, dans le discours brillant et sincère que connaît déjà notre peuple. On avait appris voilà deux jours, le mardi 23, que Chávez aborderait la question devant l’Assemblée nationale.

Cette réunion, prévue à cinq heures de l’après-midi, a commencé quasiment à l’heure. On y a écouté des interventions énergiques et précises. Tout a duré deux heures et quelques minutes. Les Vénézuéliens ont pris le problème au sérieux.

Chávez a commencé par mentionner par leurs noms certaines personnes présentes, et, après avoir blagué avec la nouvelle championne mondiale de kata et au sujet du match entre deux équipes de base-ball professionnel, il est entré progressivement dans le vif du sujet :

«… je vais, vrai de vrai, être bref. Je tiens à remercier le député Roy Daza pour le document qu’il a lu, un document qui défend non seulement le Venezuela, comme l’a dit Eva [Golinger], mais encore la patrie humaine ou, pour ainsi dire, la possibilité humaine.

« J’ai apporté des livres avec moi. […] C’est l’exemplaire, un peu plus défraîchi maintenant, que j’ai montré aux Nations Unies. Il est de Noam Chomsky, et je continue de le recommander : Dominer le monde ou sauver la planète ? L'Amérique en quête d'hégémonie mondiale[1]. Eva nous a rappelé ce grand homme de la pensée critique, de la pensée créatrice, de la philosophie, de la lutte pour l’humanité.

« Et voici sa suite : Les États manqués : abus de puissance et déficit démocratique[2]. Chomsky y affirme carrément que le premier État manqué du monde, c’est l’État étasunien, qui est devenu une vraie menace pour la planète, pour le monde entier, pour l’espèce humaine.

« Dans une partie de ces entretiens, Chomsky réfléchit sur l’Amérique latine, sur le Venezuela, d’un manière très courageuse, très objective, généreuse, défendant notre Révolution, défendant notre peuple, défendant le droit que nous avons et que nous exerçons de suivre notre propre route, comme le font tous les autres peuples du monde, mais que l’Empire yankee ignore et prétend ignorer

« Au cœur même du Capitole fédéral – je crois que c’est comme ça qu’on l’appelle – en plein Washington, un sommet de terroristes se réunit donc, une véritable bande de voyous, de délinquants, d’escrocs, de terroristes, de voleurs, de malfrats, sous l’égide de personnalités "prestigieuses" de l’establishment, non seulement de l’extrême droite républicaine, mais encore du Parti démocrate, et, comme viennent de le dire Eva, et Roy dans ce magnifique document qu’il a lu, un document de portée nationale, un document public, ces gens-là menacent ouvertement le Venezuela, les pays et les peuples de l’Alliance bolivarienne !

« D’ici, je salue Evo Morales, un compañero courageux, un camarade, et le peuple bolivien.

« D’ici, je salue Rafael Correa, un compañero courageux, un camarade, et le peuple équatorien.

« D’ici, je salue Daniel Ortega, ce comandante président, un compañero courageux, un camarade, et le peuple nicaraguayen.

« D’ici, je salue Fidel Castro, Raúl Castro, et ce courageux peuple cubain.

« D’ici, je salue tous les peuples caribéens, Roosevelt Skerrit et le peuple de la Dominique, de courageux dirigeants, Saint-Vincent-et-Grenadines, Ralf Goncalves, Spencer, les peuples de l’ALBA, de l’Alliance bolivarienne, leurs gouvernements, nos gouvernements et bien entendu, le courageux peuple vénézuélien, auquel je redis notre engagement et notre appel à l’unité, que j’appelle à continuer de se battre pour l’avenir de la patrie, pour l’indépendance dont l’acte de constitution original, comme l’a dit la présidente de l’Assemblée, Cilia, est ici même, dans cette salle, l’acte original d’il y a deux cents ans.

« L’année 2011 est toute proche. Préparons-nous de tous les points de vue, spirituel, politique, moral, pour fêter les deux cents ans de ce premier Congrès, de cette première Constitution, la première d’Amérique latine, de la naissance de la première République, de la naissance de la patrie vénézuélienne. Ce n’est pas seulement le 5 juillet, c’est toute l’année 2011, le début de la guerre révolutionnaire d’indépendance commandée d’abord par Miranda, puis par Bolívar et par les grands hommes et les grandes femmes qui nous ont donné une patrie.

« Le document qu’a lu Roy Daza s’ouvre sur une phrase de Bolívar quand il écrit à Irvine, un agent étasunien venu ici réclamer les bateaux que Bolívar et ses troupes avaient arraisonnés sur l’Orénoque parce que les États-Unis envoyaient des armes et des provisions à l’Espagne.

« Ce n’est pas nouveau, Eva, ce que tu as dénoncé ici, l’envoi de millions de dollars, l’appui logistique. Non. À cette époque-là, le gouvernement étasunien envoyait déjà des armes et des provisions aux troupes impérialistes espagnoles. C’est une lettre fameuse. Elle apparaît en partie dans un autre livre que je n’arrête pas de recommander aussi, qui se lit tout d’une traite, d’un bon écrivain cubain, Francisco Pividal : Bolívar, pensamiento precursor del antimperialismo, qui contient toute une série de citations extraordinaires. Tu as en lu une.  

« Mais, dans une lettre à cet Irvine, la dernière, je crois, quand Irvine commence à le menacer de recourir à la force, Bolívar lui écrit : Je ne vais pas tomber dans votre provocation, ni dans votre langage. Je veux seulement vous dire, M. Irvine… Je paraphrase, mais c’est l’idée, la dignité de notre père Bolivar qui s’impose, et qu’il vaut la peine de souligner dans cette salle pleine de magie, de symboles, de patrie, de rêves, d’espoir, de dignité… Bolívar lui écrit donc : Sachez, M. Irvine que la moitié ou plus – nous sommes en 1819[3], après presque une décennie de guerre à mort – ou presque la moitié des Vénézuéliens est morte dans la lutte contre l’empire espagnol, et que l’autre moitié qui est encore en vie, nous qui sommes encore là, nous brûlons d’envie de suivre la même route qu’eux si le Venezuela devait faire face au monde entier pour préserver son indépendance, sa dignité.

« Voilà comment était Bolívar. Et nous sommes ici, ses fils, ses filles, prêts à faire pareil. Que le monde le sache : prêts à faire pareil ! Si l’Empire yankee avec toute sa puissance – dont nous ne nous moquons pas, oh non, il faut le prendre très au sérieux, comme Eva nous le recommande si bien – décide de nous agresser, ou plutôt de continuer d’agresser ouvertement le Venezuela pour tenter de freiner cette révolution, nous sommes prêts, sachez-le, monsieur l’Empire et vos personnifications, à faire exactement pareil : à mourir tous pour cette patrie et pour sa dignité !

« À ce Sommet de terroristes, de génocides, qui s’est tenu à Washington, il y avait des Vénézuéliens, des Boliviens… Et nous pourrions nous demander, comme le faisait hier un bon journaliste dans une interview, avec quels passeports ces délinquants sont entrés, quels passeports ils détiennent, parce que certains sont déjà notice rouge à INTERPOL ! N’empêche qu’ils arrivent là-bas tout tranquillement, ils déambulent dans les rues de Washington, on les accueille même à bras ouverts ! Alors, oui, il a raison, Noam Chomsky, et je suis d’accord avec lui : l’État étasunien est un État manqué, qui agit sans tenir compte du droit international, qui ne respecte absolument rien et qui, par-dessus le marché, se sent parfaitement en droit de le faire, qui ne répond de rien devant personne. C’est une menace non seulement pour le Venezuela et pour les autres peuples du monde, mais aussi pour son propre peuple qui est constamment agressé par cet État antidémocratique.

« Regardez un peu, c’est juste un résumé.  Wikileaks, ça vous dit quelque chose, pas vrai ?

« Que dira cette dame, cette représentante, cette fasciste, qui nous a traités, Evo, Correa et moi, de hors-la-loi ? Alors que la hors-la-loi, c’est elle. Et un tribunal vénézuélien devrait demander son extradition pour commettre des délits et conspirer, et bien d’autres avec elle, contre la souveraineté de notre pays. Il faut clouer au pilori cette hors-la-loi et les autres !

« Que diront ces hors-la-loi de ça, par exemple? ……  Que dira le Congrès étasunien de ces rapports, de ces documents qui étaient secrets et qui ont été publiés sur le site Wikileaks.

« Je lis :

"Le 15 mars 2010, Wiki Candanga a publié un rapport du département étasunien de la Défense qui aborde plusieurs fuites apparues sur ce site web et concernant les intérêts des USA et proposait plusieurs moyens de le mettre sur la touche."

« J’ai ici quelques-uns de ces documents, qui sont publics. Reste à voir si les autorités des USA prennent une initiative contre ces crimes ou ces prétendus crimes – je ne suis pas magistrat pour en juger – ces prétendus crimes graves commis par des citoyens de ce pays, des civils, des militaires, par son gouvernement.

« Je lis :

"Le 5 avril 2010, Wikileaks a publié un vidéo où l’on voit des soldats étasuniens en train d’assassiner le reporter de Reuters, Namir Noor-Eldeen, son adjoint et neuf autres personnes. On voit clairement qu’aucun ne fait le moindre geste d’attaquer l’hélicoptère Apache à partir duquel on leur tire dessus. Bien que l’agence Reuters ait réclamé ce vidéo à maintes reprises, elle n’a jamais pu l’obtenir jusqu’à ce que Wikileaks ait publié ces images inédites qui ont mis en échec l’appareil militaire des Etats-Unis."

« Bon, mettre en échec, c’est beaucoup dire… Disons alors du point de vue moral.

« Je me le demande à nouveau : que diront les Nations Unies ? Que se passerait-il si cela était arrivé dans un pays de l’ALBA ? Que se passerait-il ? Que dira sur ce cas l’OEA, que dira le Conseil de sécurité des Nations Unies, le Conseil des droits de l’homme ? Que dira la tristement célèbre Cour internationale de justice ? Pour que vous voyez un peu le deux poids deux mesures avec lequel on mesure ici les droits de l’homme, le respect de la vie, le terrorisme et tous ces phénomènes !

« Journaux de guerre d’Afghanistan, le 25 juillet 2010, publiés aussi. Enregistrements de la guerre d’Iraq. Écoutez un peu, ça date d’à peine quelques jours :

"Le 22 octobre 2010, Wikileaks a publié sur son site web un ensemble de documents de la guerre en Iraq et de son occupation, contenant 391 831 documents du Pentagone, du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2009, qui révèlent, entre autres points, l’usage systématique de la torture, le chiffre de 109 032 morts en Iraq, dont 61 081 étaient des civils, soit 63 p. 100, 23 984 ‘ennemis qualifiés d’insurgés’, 15 196 du pays dit d’accueil [quelle manière de visiter un pays !], et 3 771 morts ‘amis’, autrement dit de la coalition. Les documents révèlent que 31 civils sont morts en moyenne chaque jour sur une période de six années."

« Qui enquête sur ça ? Qui répond de ça ? Personne, car c’est l’Empire, l’État raté étasunien ! Écoutez ceci :

"Ces documents, classés chronologiquement et par catégorie, décrivent des actions militaires meurtrières de l’armée des USA, dont la quantité de personnes assassinées, blessées ou arrêtées dans le cadre de ces actions, ainsi que l’emplacement géographique précis de chaque fait, détaillant les unités militaires impliquées et les armes utilisées."

« Assez de détails, donc, pour ouvrir une enquête. Que dira le Congrès étasunien de tout ça ? Notre ambassadeur à Washington est parmi nous. Tu es encore ambassadeur là-bas, n’est-ce pas ? Oui. Et là-bas, que je sache, pas un mot. Je continue de lire :

"La plupart des entrées du journal ont été écrites par des soldats et des membres des services de renseignement qui écoutaient les rapports transmis par radio depuis le théâtre des combats.

"Victimes civiles causées par les forces de la coalition. On a fini par connaître un grand nombre d’attaques et de morts causés par les tirs des troupes contre des chauffeurs sans armes, de crainte qu’ils ne soient pas des terroristes kamikazes.

"Un rapport signale qu’un enfant a été assassiné et un autre blessé quand la voiture où ils se trouvaient a été atteinte par des tirs de soldats. En compensation, on a versé à la famille 100 000 afghanis pour l’enfant tué, soit 1 600 euros".

« Le capitalisme paie 20 000 afghanis, soit 335 euros, pour le blessé, et 10 000 afghanis, soit 167 euros, pour le véhicule endommagé. Et les rédacteurs de ces rapports appellent ça de "petites tragédies". De petites tragédies ! Voilà la grande menace, la plus grande menace qui pèse sur l’humanité.

 

« L’Empire yankee est entré sans aucun doute dans une phase de déclin politique, économique et surtout moral, mais qui peut nier sa grande puissance militaire, ce qui, de pair avec ces facteurs, le convertisse, lui qui est le plus puissant Empire dans l’histoire, en une menace pire pour nos peuples. Que nous reste-t-il ? On l’a dit ici aussi : de l’unité, encore de l’unité, toujours de l’unité !

 

« Le Congrès des États-Unis va devenir à partir de janvier un Congrès de l’extrême droite ? Oui. Alors, le parlement vénézuélien doit devenir, à partir du 5 janvier, un parlement d’extrême gauche !

 

« Et j’appelle les députés et députées élus par le peuple, par les mouvements populaires, par les mouvements sociaux, par les partis de la révolution, à assumer le grand engagement qu’ils auront à compter du 5 janvier.

 

« En fait, c’est inouï, et Eva nous le rappelle. Comment continuons-nous de permettre, alors que nous avons une Constitution  - et combien elle a coûtée, combien d’années de bataille, combien de sueur, combien de sang, combien d’efforts, et nous avons aussi dans cette salle notre première Constitution, le premier acte de notre indépendance, qui a fait de nous un pays souverain – comment donc continuons-nous de permettre un certain nombre de choses, au risque qu’on nous qualifie de nouveau de "drôle de patrie " ou de "drôle de révolution ", ou, pour employer un langage encore plus populaire, de "lavette de révolution", comment donc continuons-nous de permettre que des partis politiques, des ONG, des personnalités de la contre-révolution soient encore financés par l’Empire yankee à coups de millions et de millions de dollars, et utilisent la pleine liberté pour abuser de notre Constitution, pour la violer, pour tenter de déstabiliser le pays ? J’implore ce Parlement de promulguer une loi très sévère pour l’empêcher. Voilà comment nous devons répondre à l’agression impériale, en radicalisant nos positions, en nous relâchant sur absolument aucun point, en ajustant nos positions, en redoublant le pas, en consolidant l’unité révolutionnaire. Et pas seulement le Parlement. Il nous faut une gauche bien plus radicalement à gauche, il nous faut un gouvernement bien plus radicalement à gauche, des forces armées, général Rangel – nous vous nommerons enfin généralissime samedi, le 27 novembre, Jour des forces armées – bien plus radicalement révolutionnaires, aux côtés du peuple.

 

« Les demi-teintes ne sont pas de mise dans nos rangs civils ou militaires. Non, la seule ligne à suivre est de radicaliser la Révolution ! Et cette bourgeoisie grossière, apatride, doit le sentir dans les côtes. Cette bourgeoisie vénézuélienne sans vergogne et sans patrie doit le sentir dans les côtes, doit savoir que tout ça se paie, qu’un de ses représentants les plus notoires ne peut aller impunément au Congrès même de l’Empire pour s’en prendre au Venezuela et continuer de posséder ici une chaîne de télévision ! Et tout dans ce style. La bourgeoisie vénézuélienne doit savoir que son agression au peuple va lui coûter cher et qu’elle ferait mieux de ne pas trop se pointer là-bas !

 

« Je me rappelle… que sous le gouvernement Betancourt, des députés de partis de gauche ont été arrêtés sans préavis ni avertissement préalable, qu’on les a fourrés en prison sans la moindre preuve  et qu’on leur a enlevé l’immunité parlementaire.

 

« Un groupe de députés d’extrême droite entrera dans quelques semaines au Parlement. Alors, je tiens à leur rappeler qu’il existe ici une Constitution. Et que, de même que le Parti communiste du Venezuela et bien d’autres partis ont été interdits à un moment donné, qu’on a enlevé l’immunité parlementaire à des nombreux députés sans la moindre preuve – d’autres ont pris le maquis, comme le grand Fabricio Ojeda qui a renoncé à son siège et a pris le maquis pour donner son sang pour la révolution et pour le peuple – de même j’imagine que ce digne Parlement n’acceptera pas, alors qu’il est le représentant majoritaire des forces populaires, que la force d’extrême droite vienne ici bouleverser l’ordre constitutionnel. Je suppose, je suis même sûr que l’État activera tous ses mécanismes pour défendre la Constitution et la loi face aux agressions qui ne se feront pas attendre.

 

« Ainsi donc, nous sommes la menace. Comment est-ce donc que les terroristes ont appelé leur réunion. "Menace dans les Andes", n’est-ce pas, Nicolás ? On dirait un titre de film. Péril dans les Andes. Non, c’est péril pour le monde entier qu’il faut dire, et il faut en avertir tout haut. Le péril est mondial.

 

« En ce moment même, il y a une situation compliqué dans la péninsule coréenne. Quand je suis venu ici, les nouvelles étaient encore confuses, aussi confus que le torpillage de ce bateau sud-coréen, le Cheonan, bien qu’on ait su après, par des preuves, qu’il avait été coulé par les États-Unis. Et maintenant, dans une petite île, sur cette péninsule divisée par l’Empire yankee, envahie, rasée pendant des années, la situation est tendue. Des bombes, des morts et des blessés.

 

« Ça fait plusieurs mois que Fidel Castro alerte au sujet des graves risques d’une guerre nucléaire. Je suis allé le voir une nouvelle fois, tout récemment, il m’a expliqué sa pensée – je la connais bien, évidemment, mais rien de mieux que le dialogue – et il me disait : Chávez, n’importe quel petit échange de coups de feu dans cette zone bourrée d’armes de destruction massive, d’armes atomiques, risque de conduire à une guerre qui serait d’abord classique, mais qui pourrait déboucher directement – il en est convaincu – sur une guerre atomique qui serait la fin de l’espèce humaine. Le danger n’est donc pas dans les Andes, crétins de Washington ! Le péril est mondial.

 

« Ici, au Venezuela, comme le disait Eva, une lumière s’est allumée, puis une autre en Amérique latine, et d’autres encore. Nous pouvons dire maintenant que l’Amérique latine est le continent de l’espoir. Et l’Empire yankee ne peut pas fermer la porte au nez de cet espoir.

 

«  Nous, les Vénézuéliens et les Vénézuéliennes, il nous est toujours échu, pour une raison ou pour une autre, ou pour des raisons de différentes natures, d’être à l’avant-garde  de ces luttes, depuis des siècles.

 

« Je vois ici les portraits de Miranda, de Bolívar, et de Martín Tovar y Tovar, des peintures de Carabobo… Comme le disait Roy avec passion : c’est dans nos gènes, dans notre sang. Il paraphrasait Mao, le Grand Timonier.

 

« Cet Empire, cet État manqué que sont les États-Unis va devenir, malgré son immense pouvoir, malgré ses menaces, un gigantesque tigre de papier. Et nous, nous devons par obligation nous convertir en de vrais tigres d’acier, en de petits tigres d’acier, invincibles, indomptables.

 

« Madame la présidente, j’ai promis au début d’être bref, et je répète ma promesse. Je crois d’ailleurs que tout a déjà été dit par Eva Golinger, cette courageuse femme, et par Roy Daza, ce courageux député, et que tout est contenu dans ce document qui va être distribué, si j’ai bien compris, aux quatre coins de Venezuela puis en Amérique latine.

 

« Je vous remercie de m’avoir invité à cette cérémonie. Et comme l’un de plus, je me joins, pour ainsi dire, à ce gigantesque bataillon pour défendre le Venezuela, pour défendre la patrie vénézuélienne.

 

« Je regarde ce tableau, ou plutôt cette œuvre monumentale de Tovar y Tovar, avec l’infanterie ici et la cavalerie là-bas. Cavalerie, au galop, pour défendre la patrie bolivarienne, pour défendre l’Alliance bolivarienne de nos peuples !

 

« A bas l’Empire yankee ! »

 

C’est sur ces mots qu’il a conclu, et sur des vivats en l’honneur de l’ALBA, de la patrie et de la révolution.

 

Je n’ai pas le moindre doute que Chávez, un militaire de profession, mais bien plus attaché à la persuasion et au dialogue qu’à la force, n’hésitera pas à empêcher la droite favorable à l’impérialisme et antipatriotique de lancer les Vénézuéliens trompés contre la force publique pour faire couler le sang dans les rues du pays. La mafia impérialiste a eu droit, en Bolivie et au Venezuela, à une riposte bien plus claire et énergique qu’elle ne l’imaginait.

 

Fidel Castro Ruz
Le 25 novembre 2010
18 h 34

 


[1] Traduction Paul Chemla, collection 10 x 18. (NdT).

[2] Paris, 2007, Fayard, traduction Paul Chemla (Failed states : the abuse of power and the assault on democracy) (NdT)

[3] La lettre est en fait du 7 octobre 1818 (Pividal, p. 116). (NdT)

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27 novembre 2010 6 27 /11 /novembre /2010 14:04

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Il est des moments dans l’histoire où un discours est de rigueur, serait-il aussi bref que l’Alea jacta est de César franchissant le Rubicon. Et il fallait le traverser le jour où les ministres de la Défense des États souverains du continent américain étaient réunis à Santa Cruz, la ville où les Yankees ont fomenté la sécession et la désintégration de la Bolivie.

Nous étions le lundi 21 novembre, et les agences de presse s’attachaient à divulguer et à commenter le Sommet de l’OTAN à Lisbonne, où cette institution belliciste proclamait, d’un ton arrogant et grossier, son droit d’intervenir dans n’importe quel pays du monde où ses intérêts seraient censément menacés.

Elle ignorait royalement le sort de milliards de personnes, ainsi que les vraies causes de la pauvreté et des souffrances de la majorité des habitants de la planète.

Le cynisme de l’OTAN méritait une réponse, qui est venu des lèvres d’un indigène aymara de Bolivie, au cœur même de l’Amérique du Sud, où une civilisation plus humaine avait fleuri avant que la conquête, le colonialisme, le capitalisme en plein essor et l’impérialisme n’eussent imposé leur domination par la force brute, fondée sur le pouvoir des armes et de technologies plus avancées.

Evo Morales, le président de ce pays élu par l’immense majorité de son peuple, a, se fondant sur des arguments, des données et des faits irréfutables, et sans doute sans même connaître l’infâme document de l’OTAN, répondu à la politique que les gouvernements étasuniens ont suivie tout au long de l’histoire envers les peuples latino-américains et caribéens.

Une politique de force qui s’est exprimée par des guerres, des crimes, des violations des constitutions et des lois ; par la formation d’officiers des institutions armées aux conspirations, aux coups d’État, aux crimes politiques ayant servi à renverser des gouvernements progressistes et à installer des régimes répressifs auxquels ils ont offert systématiquement un soutien politique, militaire et médiatique.

Jamais discours n’a été plus opportun.

Utilisant bien souvent des expressions de sa langue aymara, Evo a affirmé des vérités qui passeront à l’histoire.

Je vais m’efforcer de résumer ce qu’il a dit en le reprenant textuellement.

« C’est pour moi une énorme satisfaction d’accueillir à Santa Cruz de la Sierra les ministres de la Défense d’Amérique. Santa Cruz est la terre d’Ignacio Warnes, de Juan José Manuel Vaca,  d’hommes rebelles qui se sont battus depuis 1810 et qui ont donné leur vie pour l’indépendance de notre chère Bolivie. D’hommes comme Andrés Ibáñez,  Atahuallpa Tumpa, un frère indigène, d’hommes qui, sous la République, se sont battus pour son autonomie et pour l’égalité des peuples de notre terre.

« Bienvenue en Bolivie, la terre de Túpac Katarí, la terre de Bartolina Sisa, de Simón Bolívar et tant d’autres qui se sont battus voilà deux cents ans pour l’indépendance de ce pays et de bien d’autres en Amérique.

« L’Amérique latine… vit ces dernières années de profondes transformations démocratiques, à la recherche de l’égalité et de la dignité des peuples…

« …suivant les pas d’Antonio José de Sucre, de Simón Bolívar, de tant d’autres dirigeants indigènes, métis, créoles qui ont vécu voilà deux cents ans.

« Voilà une semaine exactement, le 14 novembre, nous avons fêté le bicentenaire de l’armée bolivienne, dans laquelle, en 1810, les indigènes, les métis et les créoles s’étaient organisés militairement pour combattre la domination espagnole.

« Les peuples d’Amérique latine ont, ces derniers temps, décidé une nouvelle fois de se libérer, et cette deuxième libération ne sera pas seulement sociale et culturelle, mais encore économique et financière.

« …cette Neuvième Conférence des ministres de la Défense va débattre de la sexospécificité et du multiculturalisme dans les forces armées ; de la démocratie, de la paix et de la sécurité des Amériques ; des catastrophes naturelles, de l’aide humanitaire et du rôle des forces armées. C’est là un ordre du jour judicieux, un ordre du jour bien conçu, qui doit permettre de débattre de l’espoir des peuples non seulement d’Amérique latine, mais du monde.

« En 1985… seuls ceux qui avaient de l’argent, une profession et qui parlaient espagnol avaient le droit d’être élu et d’élire.

« Moins de 10 p. 100 de la population bolivienne pouvaient donc participer aux élections, être élus ou élire les autorités, et plus de 90 p. 100, nous, nous n’avions pas ce droit… différents processus ont eu lieu… différentes réformes, mais c’est seulement en 2009 que le peuple bolivien tout entier a eu pour la première fois le droit de se doter d’une nouvelle Constitution qui entérinait notre État plurinational.

« …dans les autres Constitutions, bien entendu, les secteurs les plus marginalisés… n’avaient pas le droit d’être élu ni d’élire les autorités de l’État, de la République de Bolivie.

« Il a fallu attendre cent quatre-vingts ans pour pouvoir opérer de profondes transformations et incorporer ces secteurs historiquement marginalisés en Bolivie. Aujourd’hui, si je ne me trompe, je crois que c’est le seul pays d’Amérique, voire au monde, où la moitié des ministres sont des femmes.

« Bien entendu, indépendamment des normes de la Constitution… je sens que le plus important pour incorporer ces secteurs les plus abandonnés, c’est la décision politique. Maintenant, depuis la Constitution de 2009, les plus marginalisés, les plus méprisés, ceux qui étaient considérés comme des bêtes, autrement dit les indigènes et leur mouvement, sont représentés à l’Assemblée législative plurinationale et aux assemblées départementales.

« L’important, c’est que là où les mouvements indigènes ne sont pas nombreux, dans l’altiplano, dans la vallée de l’Est bolivien, on a créé des circonscriptions spéciales pour qu’ils soient représentés.

« Les circonscriptions uninominales permettent aussi à nos frères les indigènes d’être représentés à l’Assemblée législative plurinationale…

« C’est ainsi que nous avons permis la présence de ces frères indigènes autrefois abandonnés,  condamnés à l’extermination.

« Tout ça n’existait pas avant…

« …quand j’étais très jeune, je critiquais parfois les forces armées comme dirigeant syndical. Ensuite, quand je suis arrivé à la présidence, je me suis rendu compte qu’une bonne partie des forces armées viennent des communautés paysannes, surtout de la Vallée…

« Je veux vous dire, chers ministres, que maintenant la participation existe pour de bon, qu’avant seule la couleur de la peau déterminait votre place dans l’échelle hiérarchique de la société. Maintenant, un indigène, un dirigeant syndical, un intellectuel, un membre des professions libérales, un entrepreneur, un militaire, un général, n’importe qui peut être élu président démocratiquement. Avant, ça n’existait pas. Il a fallu changer la Bolivie et notre Constitution.

« L’un des points de cette Conférence est la démocratie, la sécurité et la paix. Mais il est passionnant de réviser l’histoire, non seulement celle d’Amérique, mais encore du monde.

« Pour parler de la démocratie en Bolivie par le passé, il faut dire qu’il n’y avait qu’une démocratie négociée. Il n’y avait pas de parti qui pouvait gagner avec plus de la moitié des voix, comme le dit la Constitution politique de l’État plurinational.

« …en Bolivie, de 1952 à 2005, il n’y avait que des démocraties négociées, des partis qui remportaient les élections avec 20 ou 30 p. 100 des voix.

« Le candidat d’un parti qui arrivait en troisième pouvait devenir président, parce que ça dépendait des pactes et de la répartition des ministères, et ce genre de pacte était aux mains de l’ambassadeur étasunien. Nos compatriotes doivent se rappeler qu’en 2002, par exemple, quand il ne fallait  pas remporter la moitié des voix, le parti vainqueur n’avait obtenu que 21 p. 100 des voix, et que l’ancien ambassadeur étasunien, Manuel Rocha, s’est efforcé de faire négocier ces partis néolibéraux pour qu’ils puissent gouverner. Mais ces gouvernements n’ont pas duré, n’ont pas supporté.

« Heureusement, grâce à la conscience du peuple bolivien, nous avons surmonté ce genre de démocratie. Nous n’avons plus une démocratie négociée, nous avons une démocratie légitime, répondant à la pensée du peuple bolivien, aux sentiments du peuple bolivien qui a connu la souffrance sous ce genre de gouvernement.

« …un programme pour rendre leur dignité aux Boliviens, un programme qui cherche l’égalité des Boliviens, un programme qui récupère les ressources naturelles, un programme qui fait des services de base un droit humain…

« …quand certains de nos opposants – comme vous en avez, vous, dans vos pays – nous accusent d’être un gouvernement totalitaire, un gouvernement autoritaire, un gouvernement dictatorial, je me dis : est-ce ma faute si ce programme de gouvernement proposé par un parti recueille plus des deux tiers des voix dans les différentes structures de l’État plurinational ? La seule mairie que je n’ai pas pu gagner, c’est celle de Santa Cruz.

« Nous respectons ce maire, il a gagné, mais je  vous félicite, monsieur le maire, pour les actions que vous avez engagées la semaine dernière afin de combattre l’agiotage, la spéculation… mes félicitations, mes respects, monsieur le maire.

« Certains nous accusent de pensée unique. Il n’y a pas de pensée unique, juste un programme mis au point par les différents secteurs sociaux à la tête des mouvements sociaux d’indigènes et d’ouvriers, et qui est le seul à obtenir cet appui pour changer la Bolivie.

« Mais que voyons-nous quand nous parlons de démocratie ? Des conspirations, un coup d’État, des tentatives de putsch en 2008. […] Et qui était la cheville ouvrière de ce coup d’État ? L’ancien ambassadeur des USA.

« J’ai révisé un peu d’histoire… Au sujet du coup d’État de 1946 contre le lieutenant-colonel Gualberto Villaroel, un président qui a dit : Je ne suis pas l’ennemi des riches, mais je suis plutôt l’ami des pauvres. Et ce militaire patriote a été le premier président à convoquer un Congrès indigène.

« Un autre président, Germán Bush, un militaire, a dit : Je ne suis pas arrivé à la présidence pour servir les capitalistes.

« Le premier président à avoir nationalisé les ressources naturelles – je parle de 1937 ou 1938 – a été un autre militaire, David Toro… qui a été assassiné en 1946, pendu dans le Palais.

« …l’offensive se concentrait sur le Palacio Quemado, attaqué depuis la rue Illimani, depuis le carrefour de la rue Bolívar, depuis la rue du Commerce, depuis la police, et, par-derrière, depuis l’édifice Lasalle et depuis l’édifice Kersul, siège du consulat des USA.

« …le feu provenait aussi de l’édifice Kersul, le consulat étasunien. Tout ceci pour liquider ce militaire patriote qui avait réuni le premier Congrès indigène. Les documents que j’ai révisés le prouvent.

« …l’histoire se répète. J’ai dû moi aussi faire face à un ambassadeur, qui organisait, qui planifiait une action antidémocratique pour en finir avec moi. Et je vois que ceci se répète dans le monde entier.

« Mais un compagnon, un compatriote, dans notre pays victime de tant de putschs militaire, que me dit-il ? Voilà : "Président Evo, vous devez vous méfier de l’ambassade des États-Unis. Il y a toujours eu des coups d’État en Amérique latine. Le seul endroit où il n’y a pas eu de coups d’État, c’est aux États-Unis, parce qu’il n’y a pas d’ambassade étasunienne."

« …plusieurs pays ont dû supporter des tentatives de coups d’État : le Venezuela en 2002, la Bolivie en 2008, le Honduras en 2009, l’Équateur en 2010. Et nous devons reconnaître, compatriotes d’Amérique latine ou d’Amérique, que les USA nous ont battu au Honduras, qu’ils y ont consolidé le coup d’État, que l’Empire étasunien nous a gagnés. Mais les peuples d’Amérique ont gagné, eux, au Venezuela, en Bolivie, en Équateur. Nous avons gagné… Quel sera l’avenir ? Cet avenir, nous le verrons.

« …cette analyse interne doit entraîner un débat profond des ministres de la Défense afin de garantir les démocraties […] mes ancêtres, mon peuple a constamment été victime de coups d’État, de putschs sanglants, non parce que les militaires, les forces armées le voulaient, mais par suite de décisions politiques internes et externes visant à liquider des gouvernements révolutionnaires, des gouvernements qui naissent du peuple. Voilà l’histoire de l’Amérique latine.

« …nous avons le droit de proposer les façons de garantir la démocratie dans chaque pays, mais sans coup d’État ni tentatives de putsch.

« Nous voudrions que cette Conférence des ministres de la Défense garantisse une démocratie véritable des peuples, en respectant nos différences entre régions, entre secteurs.

« Mais quand nous parlons de paix, je me demande aussi : comment la paix peut-elle régner s’il y a des bases militaires ? Et je peux là aussi parler en connaissance de cause parce que j’ai été victime de ces bases militaires étasuniennes sous prétexte de lutte contre le trafic de drogues.

« Quand j’étais un bleu des forces armées en 1978, les officiers et sous-officiers m’avaient appris à défendre la patrie, et ils me disaient que les forces armées servaient à ça, à défendre la patrie, et qu’elles ne pouvaient pas permettre la présence dans leurs rangs d’un étranger en uniforme et armé.

« …quand je suis devenu dirigeant, je me suis rendu compte personnellement que l’agence antidrogues, la DEA, des USA, avec des gens en uniforme et armés, non seulement dirigeait les forces armées et la police nationale, mitraillette au poing, sous prétexte de lutte contre le trafic de drogues, mais qu’elle poursuivait les mouvements sociaux, qu’elle utilisait ses petits avions pour suivre les marches depuis Santa Cruz, depuis Cochabamba, depuis Oruro, même si après elle rentrait en disant qu’il s’agissait de marches fantômes… Des marches fantômes, allons donc ! C’était de milliers de compagnons marchant pour leurs revendications, cherchant la dignité et la souveraineté de nos peuples.

« …si nous les peuples, nous luttons pour notre dignité, pour notre souveraineté, ils ne pourront pas l’empêcher malgré leurs bases militaires et leurs interventions armées. Si petits que nous soyons, nous les pays dits sous-développés, dit en voie de développement, nous avons de la dignité, nous avons notre souveraineté.

« Quand j’étais parlementaire, je me rappelle qu’on a tenté de me faire voter l’immunité des fonctionnaires de l’ambassade étasunienne. C’est quoi, l’immunité? Eh bien, que les fonctionnaires de l’ambassade étasunienne, y compris ceux de la DEA, ne soient pas jugés par les lois boliviennes en cas de délit. C’était là leur donner carte blanche pour tuer, pour blesser, comme ils l’ont fait dans ma région.

« …la paix est la fille légitime de l’égalité, de la dignité, de la justice sociale. Sans dignité, sans égalité, sans justice sociale, il est impossible de garantir la paix. Comment pourrions-nous la garantir ? Les peuples se soulèvent parce qu’il y a une injustice.

« …j’écoutais le secrétaire général des Nations Unies qui parlait des doctrines. Nous connaissons des doctrines en Bolivie, la doctrine anticommuniste, les putschs militaires, pour pouvoir intervenir militairement dans les centres miniers, parce que les mouvements sociaux, les centres miniers étaient de grands centres révolutionnaires pour transformer la Bolivie.

« Dans les années 50 et 60, on accusait les dirigeants du secteur minier d’être des rouges, des communistes, ce qui permettait de nous exiler, de nous bannir, de nous juger, de nous massacrer. Cette époque est révolue. De nos jours, on ne peut nous accuser de rouges,  de communistes, nous avons tous le droit de penser différemment.

« Si la solution pour un pays, pour une région, est le communisme, parfait. Pour d’autres, ce sera le socialisme, pour un autre, le capitalisme, mais toujours en fonction de la décision démocratique de chaque pays.

« Mais, depuis que nous avons gagné cette lutte et que la doctrine anticommuniste ne suffit plus à faire taire les peuples, à changer des présidents, à changer des gouvernements, alors on nous invente une autre doctrine : la guerre contre la drogue.

« Bien entendu, notre obligation à tous est de lutter contre les drogues […] La Bolivie n’a pas de culture des drogues, ou de la cocaïne. Car, d’où vient la cocaïne? Du marché des pays développés. Et ça, ce n’est pas de la responsabilité du gouvernement national, même s’il est obligé de la combattre.

« …la lutte contre le trafic de drogues ne peut être fondée sur des intérêts géopolitiques. On ne peut, sous prétexte de lutte contre le trafic de drogues, sataniser les mouvements sociaux, les criminaliser, on ne peut confondre feuille de coca et cocaïne, on ne peut confondre le producteur de feuille de coca et le trafiquant de drogues, ou la consommation légale de la feuille de coca avec la toxicomanie.

« Si la coca était nocive, pourquoi donc ne l’ont-ils pas combattue depuis le siècle dernier ? Les Européens étaient les premiers propriétaires fonciers à exploiter la feuille de coca. On n’en faisait pas de la cocaïne.

« Les administrations étasuniennes distribuaient avant des certificats de reconnaissance aux meilleurs producteurs de feuilles de coca. Pourquoi ? Parce que ces producteurs de feuille de coca fournissaient les mineurs d’étain pour qu’ils puissent continuer de travailler et parce que cet étain, les USA l’emportait chez eux !

« …le monde le sait, vous-mêmes le savez, la prétendue guerre contre la drogue a échoué. Il faut changer cette politique. Et quelle est donc la nouvelle politique ? Par exemple, en finir avec le secret bancaire. Ce gros ponte de la drogue, ce gros trafiquant de drogues, vous croyez qu’il se ballade avec son argent dans la valise, qu’il prend l’avion avec ? Non, son argent circule dans les banques. Alors, pourquoi ne pas briser le secret bancaire pour en finir avec le trafic de drogues, pour contrôler le gros trafiquant de drogues ?

« Parce que ce ne sont pas tous les pays qui peuvent interdire l’entrée de la drogue chez eux avec des technologies pareilles, des radars… Je sens qu’il peut exister une capacité de contrôle, et que nous ne  puissions pas contrôler. Mais on ne peut imposer aux autres pays, sous prétexte de lutte contre le trafic de drogues, des politiques de contrôle et surtout des politiques qui visent à récupérer les ressources naturelles au profit des transnationales.

« …que disait par exemple l’ancien ambassadeur étasunien, Manuel Rocha ? Ne votez pas pour Evo Morales. Evo Morales est le Bin Laden des Andes et les planteurs de coca sont les talibans !

« Autrement dit, chers ministres de la Défense, selon ce genre de doctrine, vous êtes réunis avec le Bin Laden des Andes, tandis que mes compagnons des mouvements sociaux sont des talibans ! Voyez un peu ces accusations, ces inventions !

“…et maintenant que les doctrines anticommunistes, ou antiterroristes ne fonctionnent plus très bien, on nous sort une nouvelle doctrine, que nous avons écoutée voilà quelques jours. Et je veux saisir l’occasion d’en informer mon peuple à travers les médias.

« Le 17, certains Latino-américains se sont réunis avec des législateurs des États-Unis au Congrès dans le cadre d’un forum intitulé : "Danger dans les Andes, menaces à la démocratie, aux droits de l’homme et à la sécurité interaméricaine".

« …la représentante Ileana Ros-Lehtinen, par exemple, que dit-elle ? Eh bien, qu’elle a observé avec préoccupation, ces dernières années, les efforts de plusieurs gouvernements de la région, comme ceux d’Hugo Chávez au Venezuela, d’Evo Morales en Bolivie, de Daniel Ortega au Nicaragua, de Rafael Correa en Equateur, pour consolider leur pouvoir coûte que coûte, et que les gouvernements de l’ALBA, Chávez à leur tête, manipulent le système démocratique de leurs pays pour servir leurs objectifs autocratiques.

« Je veux dire à cette représentante qu’ici, nous n’avons pas gagné les élections comme aux USA, avec une différence d’un ou deux pour cent, mais avec plus de 50 p. 100, ou plus de 60 p. 100, et même plus de 80 p. 100 dans certaines régions. Ça, c’est la vraie démocratie !

« Pareil pour Daniel Ortega. Que dit-on du cocalero Evo Morales? Qu’il est en train de nouer une nouvelle alliance avec l’Iran et la Russie. Quant à Rafael Correa, lui, il fait de douteuses réformes constitutionnelles à partir de postulats anti-USA.

« …sous ma direction, la Bolivie passera des accords, des alliances avec le monde entier. Personne ne va m’interdire, nous avons le droit, nous avons une culture du dialogue.

« …sans partenaires démocratiques stables, il ne peut y avoir de sécurité régionale. Les USA ne peuvent chercher la sécurité pour eux tout seuls. Il est temps que l’Organisation des États américains mette au rebut sa double morale, son deux poids deux mesures, et fasse respecter par tous les États membres les principes et les obligations fondamentales de la Charte démocratique interaméricaine. En fait, il faudrait la réviser !

« Quant à l’autre représentant [Evo Morales parle de Connie Mack], j’ai ici toute son intervention, mais je vais résumer ses idées essentielles. Voilà en gros ce qu’il dit :

Comme membre de ce Congrès, j’ai pu observer ces six dernières années l’administration républicaine et l’administration démocrate. Leur idée à toutes les deux au sujet d’Hugo Chávez est de ne pas intervenir, de nous asseoir et d’attendre qu’il implose de lui-même, ou alors que Chávez est fou. Je ne partage aucune de ces deux vues : je ne crois pas qu’Hugo Chávez soit fou, et je ne crois pas que cette approche d’attendre qu’il implose va fonctionner. Hugo Chávez est une menace pour la liberté et pour la démocratie en Amérique latine et dans le monde. C’est ce qui m’inquiète le plus. J’espère que quand nous deviendrons la majorité au Congrès et que je serai président de la sous-commission, nous ferons justement ça : nous charger de Chávez, autrement dit le vaincre politiquement ou le liquider physiquement.

« Donc, ce législateur Connie Mack est bel et bien un assassin avoué ou un conspirateur avoué contre notre compagnon, notre frère, le président vénézuélien Hugo Chávez.

« Si quelque chose arrive à Hugo Chávez, le seul responsable sera ce législateur étasunien, qui dit ça publiquement et dont l’intervention est reproduite par les médias.

« Compagnon, frère secrétaire général de l’OEA : vous devez nous expulser, nous, le Venezuela, l’Équateur et la Bolivie, et aussi le Nicaragua, et nous appliquer des sanctions. Quoi donc ? Sûrement un blocus économique comme celui contre Cuba.

« Les sanctions, ça veut sans doute dire ça. Dites-moi comment nous pouvons garantir la sécurité et la paix des Amériques quand vous entendez ces prises de position de certains législateurs et de certains Latino-Américains ?

« Je suis allé chercher pour quelle raison l’OEA avait expulsé Cuba en 1962 : parce qu’elle était léniniste, marxiste et communiste. Maintenant, la nouvelle doctrine est une doctrine contre l’ALBA. Comme c’est nous qui l’avons organisée… J’en profite pour saluer Fidel, pour saluer Chávez, et d’autres présidents. Parce que notre doctrine à nous, ceux de l’ALBA, c’est de forger un instrument d’intégration, de solidarité, de solidarité sans conditions, une manière de partager au lieu de rivaliser, des politiques de complémentarité et non de concurrence.

« … seuls de petits groupes tirent parti de la concurrence, et non les majorités, qui attendent autre chose de leurs présidents.

« Dans le cadre de ces politiques de concurrence – et non de complémentarité – le capitalisme n’est même plus une solution au capitalisme. Il suffit de voir la crise financière.

« Avant, les doctrines venaient de l’École de Panama, du Commandement Sud, où s’entraînaient nos militaires. Ils ont dû fermer cette école à la suite des luttes de nos peuples. Maintenant, ce n’est plus l’École des Amériques qu’elle s’appelle. Mais par quoi l’a-ton remplacée ? Par des opérations mixtes de forces spéciales.

« …j’admire certains officiers de nos forces armées qui ont informé en détails au sujet de ces entraînements qui se font par roulement annuel dans les différents pays latino-américains. Pourquoi ces entraînements ? Pour former les officiers sur la manière de liquider ces pays révolutionnaires, les pays qui font de profondes transformations démocratiques, ou encore pour former exclusivement des francs-tireurs capables de tuer des dirigeants.

« …j’avais vu avec une grande indignation des vidéos de ces opérations mixtes de forces spéciales qui se font par roulement dans chaque peuple. Bien entendu, la Bolivie ne participe plus – et ne participera jamais plus tant que je serai président – à ces opérations mixtes qui continuent d’attenter à la démocratie.

« …pour le mouvement indigène […], cette planète ou Pachamama peut exister sans l’être humain, mais nous, les êtres humains, nous ne pouvons pas vivre sans la Pachamama.

« …le capitalisme n’est pas la propriété privée. Parfois, on tente de nous tromper en disant que le président Evo remet en cause le capitalisme et qu’il va nous prendre nos maisons, nos voitures. Non, la propriété privée est garantie en Bolivie.

« …la nouvelle Constitution garantit une économie plurielle, autrement dit la propriété privée, la propriété communale, la propriété publique, celle de tous les secteurs sociaux. Mais quand nous parlons du capitalisme, nous parlons de ce développement irrationnel, irresponsable, illimité.

« Nos compagnons ne trouvent déjà plus d’eau dans l’Amazonie. Quand vous forez, vous constatez que l’eau se trouve de plus en plus profond et qu’elle n’est pas abondante. Et justement, à cause du réchauffement mondial, la sécheresse s’installe, et les familles doivent abandonner l’endroit si vous ne leur garantissez pas d’eau. On appelle ça des migrants climatiques, et ils sont maintenant des millions dans le monde.

« Et ce problème, nous n’allons pas pouvoir le régler en faisant participer les forces armées, ou avec la participation ou la coopération des ministres de la Défense. Non, c’est un problème structurel de nature mondiale.

« …nous voudrions le régler ici sur le moyen et le long termes, mais la meilleure solution pour en finir avec les catastrophes naturelles, c’est d’en finir avec le capitalisme, en modifiant ces politiques de surindustrialisation.

« Bien entendu, tous les pays veulent s’industrialiser au profit de la vie, au profit de l’être humain. Mais nous ne voulons pas d’une industrialisation qui liquide la vie, qui liquide les êtres humains. Vous avez des doctrines qui proclament et prônent la guerre ; certains peuples ou États vivent de la guerre. Il faut en finir. Et pour en finir, il faut liquider ces grandes industries d’armements.

« …je sais que de nombreux ministres ont un message de leur président, de leur gouvernement, de leur peuple. Mais soyons responsables envers la vie, et soyons donc responsables envers la planète, envers la Pachamama, envers la Terre nourricière. Et être responsables envers la Terre nourricière, envers la planète, envers la Pachamama, ça veut dire respecter les droits de la Terre nourricière.

« …si seulement l’Amérique latine pouvait, à travers vous, ministres de la Défense, garantir le droit de la Terre nourricière, garantir les droits humains, la vie, l’humanité, non seulement au profit de l’Amérique, mais à celui du monde entier. Je sens que nous avons une énorme responsabilité dans cette conjoncture.

« Je tiens à saluer nos forces armées. Je vais être franc : en 2005, en 2006, quand je suis arrivé à la présidence, j’avais très peur parce que je ne savais pas si les forces armées m’accompagneraient ou non.

« …des forces armées qui participent aux travaux sociaux, aux  changement structurels, à la récupération des mines, qui appuient les politiques de récupération des ressources naturelles, voilà les forces armées qu’aime le peuple bolivien.

« Le peuple sent que ses forces armée sont à lui. Nous avons maintenant, heureusement, deux structures importantes dans l’État plurinational : les mouvements sociaux qui défendent les ressources naturelles et les forces armées qui les défendent aussi. Quand les forces armées ont vu le jour en 1810, elles étaient là pour défendre les ressources naturelles, l’identité de nos peuples, leur souveraineté. Il est vrai qu’à certaines étapes, les forces armées ont joué un mauvais rôle, mais pas à cause de leurs commandants, mais à cause d’intérêts oligarchiques ou sans rapport avec nos peuples, et elles ont fait beaucoup de mal.

« …les diktats politiques venant d’en-haut et du dehors, du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, afin de privatiser, d’aliéner les sociétés publiques.

« Des profits, seuls 18 p. 100 allaient aux Boliviens, et les 82 p. 100 restants étaient empochés par les sociétés transnationales.

« Par le décret suprême du 1er mai 2006, nous avons d’abord fait passer les ressources naturelles sous le contrôle de l’État. Ensuite, comme nous sommes convaincus que l’investisseur a le droit d’avoir des profits et d’amortir son placement, nous avons décidé, après avoir consulté les spécialistes, qu’avec un taux de profit de 18 p. 100, il pouvait récupérer son investissement et faire des bénéfices. Donc, depuis le 1er mai 2006, les entreprises qui investissent ont droit à 18 p. 100, et les 82 p. 100 restants vont au peuple bolivien. Voilà notre forme de nationalisation, qui respecte l’investissement privé. »

Evo a conclu son allocution en donnant des chiffres qui prouvent incontestablement les bons résultats économiques de la révolution :

« Le Produit intérieur brut était en 2005 de 9 milliards de dollars ; il est en 2010 de 18,5 milliards.

« …à l’époque de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, le revenu moyen annuel par habitant était de 1 000 dollars ; sous notre gouvernement, de 1 900 dollars.

« …en 2005, la Bolivie était située à l’avant-dernier rang en matière de réserves internationales, avec 1,7 milliard de dollars ; aujourd’hui, elle en possède 9,3 milliards…

« …quand nous dépendions des gouvernements étasuniens, nous ne pouvions même pas liquider l’analphabétisme ; aujourd’hui, grâce à la coopération inconditionnelle, surtout de Cuba, et du Venezuela, nous avons déclaré la Bolivie, voilà deux ans, Territoire libre d’analphabétisme, au bout de presque deux cents ans.

« Que nous demande Cuba en échange de cette coopération ? Rien. Ça s’appelle solidarité, partager le peu qu’on a et non pas ce qu’on a de trop. Ça, je l’ai appris du compagnon Fidel pour qui j’ai beaucoup d’admiration. »

C’est uniquement par modestie qu’Evo n’a pas parlé des avancées colossales du peuple bolivien en matière de santé. Rien qu’en ophtalmologie, environ 500 000 Boliviens ont été opérés de la vue ; les services de santé touchent tous les habitants, tandis qu’environ 5 000 spécialistes en Médecine générale intégrale sont en cours de formation et recevront bientôt leur diplôme. Ce pays frère latino-américain a de quoi se sentier fier.

Evo a conclu :

« …sans le Fonds monétaire international, autrement dit sans personne qui nous impose des politiques économiques de privatisation, de bradage, nous pouvons avancer encore plus en matière de démocratie. Si nous ne dépendons pas des États-Unis, nous améliorons notre démocratie en Amérique latine. Voilà le résultat de mes cinq années de président.

« Je ne veux pas dire par là que la Bolivie n’a pas besoin de coopération. La Bolivie a encore besoin de crédits internationaux, de coopération internationale, de facilités de crédit, parce que nous sommes en train d’opérer de profondes transformations, et j’en profite pour saluer les pays d’Europe et d’Amérique latine qui coopèrent avec nous…

« …que les peuples aient le droit de décider d’eux-mêmes de leur démocratie, de leur sécurité. Mais tant qu’on continuera d’avoir des politiques interventionnistes au moindre prétexte… la libération des peuples prendra du temps. De toute façon, tôt ou tard, les peuples, comme nous pouvons le voir, continueront de se rebeller.

« …j’en suis convaincu, de la rébellion à la révolution, de la révolution à la décolonisation… »

À peine quarante-huit heures après le discours d’Evo, celui de Chávez frappait comme un éclair. Les lumières de la rébellion illuminent les cieux de Notre Amérique.

 

 

Fidel Castro Ruz

Le 24 novembre 2010

19 h 36

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23 novembre 2010 2 23 /11 /novembre /2010 01:47

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Bien des gens ont un haut-le-cœur rien que d’entendre nommer cette organisation.

Les vingt-huit membres de cette institution militariste, engendrée par les États-Unis, ont décidé, le vendredi 19 novembre 2010 à Lisbonne (Portugal), de créer ce qu’ils ont qualifié cyniquement de « nouvelle OTAN ».

L’ «  antérieure » a vu le jour après la Deuxième Guerre mondiale, comme instrument de la Guerre froide déclenchée par l’impérialisme contre l’Union soviétique, le pays qui avait payé sa victoire sur le nazisme de plusieurs dizaines de millions de vies et d’une destruction colossale.

Les États-Unis mobilisèrent contre l’URSS, en même temps qu’une partie saine de la population européenne, l’extrême droite et toute la lie nazi-fasciste d’Europe, bourrée de haine et prête à tirer profit des erreurs commises par les dirigeants soviétiques après la mort de Lénine.

Le peuple soviétique fut capable, au prix d’énormes sacrifices, de préserver la parité nucléaire et d’appuyer la lutte de libération nationale de nombreux peuples, malgré les efforts que les États européens consentaient pour maintenir le système colonial imposé par la force au cours des siècles et qui s’allièrent dans l’après-guerre à l’impérialisme yankee quand celui-ci prit les rênes de la contre-révolution dans le monde.

L’opinion mondiale a reçu en à peine dix jours – moins de deux semaines – trois grandes leçons inoubliables : le G-20(Séoul), l’APEC (Yokohma) et l’OTAN (Lisbonne), de sorte que tous les honnêtes gens sachant lire et écrire et dont les cerveaux n’ont pas été castrés par les réflexes conditionnés que favorise l’appareil médiatique de l’impérialisme peuvent avoir une idée réelle des problèmes qui flagellent aujourd’hui l’humanité.

À Lisbonne, les chefs d’État n’ont pas prononcé un seul mot capable de transmettre de l’espoir aux milliards de personnes qui souffrent de la pauvreté, du sous-développement, de la pénurie d’aliments, de logements, de santé, d’éducation et d’emplois.

Au contraire, le personnage infatué de lui-même qui fait fonction de chef de la mafia militaire de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a déclaré, sur un ton de chefaillon  nazi, que le « nouveau concept stratégique » permettait d’ « opérer n’importe où dans le monde ». Ce n’est pas pour rien que le gouvernement turc a failli bloquer sa nomination quand ce néolibéral danois, alors Premier ministre,  avait, arguant de la liberté de la presse, défendu en avril 2009 les auteurs de graves offenses au prophète Mahomet, respecté par tous les musulmans.

Bien des gens dans le monde se rappellent les relations de coopération étroites nouées entre le gouvernement danois et les « envahisseurs »  nazis durant la Deuxième Guerre mondiale.

L’OTAN, cet oiseau de proie incubé dans le nid de l’Empire yankee, dotée d’armes nucléaires tactiques qui peuvent être plusieurs fois plus destructrices que la bombe qui fit disparaître Hiroshima, s’est compromise aux côtés des USA dans la guerre génocidaire d’Afghanistan, encore plus complexe que l’équipée du Kosovo et que la guerre contre la Serbie où elle bombarda Belgrade et où elle aurait frôlé le désastre si le gouvernement de ce pays était resté ferme au lieu de faire confiance aux institutions de justice internationale de La Haye.

L’infâme Déclaration de Lisbonne affirme d’une manière vague et abstraite à l’un de ses points : « Soutien à la stabilité régionale, aux valeurs démocratiques, à la sécurité et à l’intégration de l’espace euro-atlantique dans les Balkans… La mission au Kosovo s’oriente vers une présence plus réduite et plus souple. »

Maintenant !

La Russie ne pourra pas non plus oublier si facilement que, quand Eltsine désintégra l’URSS, les USA en profitèrent pour avancer les frontières de l’OTAN et ses bases d’attaque nucléaire vers le cœur de ce pays, depuis l’Europe et l’Asie.

Ces nouvelles installations militaires menaçaient aussi la République populaire de Chine et d’autres pays asiatiques.

Quand ceci se passait (1991),  des centaines de SS-19, de SS-20 et d’autres armes soviétiques puissantes pouvaient frapper en quelques minutes les bases militaires des USA et de l’OTAN en Europe. Aucun secrétaire général de l’OTAN n’aurait osé parler avec autant d’arrogance que ce Rasmussen.

Le premier accord concernant la limitation des armes nucléaires fut souscrit à une date aussi lointaine que le 26 mai 1972, entre le président étasunien Richard Nixon et le secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique, Leonid Brejnev, en vue de limiter le nombre de missiles balistiques antibalistiques (traité ABM) et de défendre certains points contre des missiles équipés d’ogives nucléaires.

Brejnev et Carter signèrent à Vienne, en 1979,  de nouveaux accords connus comme SALT II,  que le Sénat étasunien refusa toutefois de ratifier.

Le nouveau réarmement promu par Reagan, autrement dit l’Initiative de défense stratégique, liquida définitivement les accords SALT. Et la CIA avait déjà fait exploser le gazoduc sibérien.

Un nouvel accord fut toutefois signé en 1991 entre Bush père et Gorbatchev, cinq mois avant l’effondrement de l’URSS et alors que le camp socialiste n’existait déjà plus. Les pays que l’Armée rouge avait libérés de l’occupation nazie ne furent même pas capables de maintenir leur indépendance. Des gouvernements de droite qui accédèrent au pouvoir entrèrent avec armes et bagages  dans l’OTAN et tombèrent aux mains des États-Unis. Celui de la RDA qui, sous la direction d’Erich Honecker, avait fait de grands efforts, ne put vaincre l’offensive idéologique et consumériste lancée depuis la capitale qu’occupaient les troupes occidentales.

Virtuellement maîtres du monde, les USA renforcèrent leur politique aventurière et guerrière.

Au terme d’une évolution bien manipulée, l’URSS se désintégra. Le coup de grâce fut assené par Boris Eltsine, le 8 décembre 1991, quand, en sa qualité de président de la Fédération de Russie, il déclara que l’URSS avait cessé d’exister. Le 25 décembre, le drapeau rouge frappé de la faucille et du marteau fut amené sur le Kremlin.

Un troisième accord sur les armes stratégiques fut alors signé entre George H. W. Bush et Boris Eltsine, le 3 janvier 1993, qui interdisait le recours aux missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) à ogives multiples et qui fut ratifié par le Sénat étasunien, le 26 janvier 1993, par 87 voix contre 4.

La Russie avait hérité la science et la technologie de l’Union soviétique – laquelle, malgré la guerre et les énormes sacrifices qu’elle impliqua, fut capable d’égaler en pouvoir l’immense et riche Empire yankee – de la victoire sur le fascisme, des traditions, de la culture et des gloires du peuple russe.

Par la guerre contre la Serbie, un peuple slave, l’OTAN avait durement entamé la sécurité du peuple russe, ce qu’aucun gouvernement ne pouvait se payer le luxe d’oublier.

La Douma russe, indignée par la première guerre contre l’Iraq et par celle du Kosovo durant laquelle l’OTAN avait bombardé le peuple serbe, se refusa à ratifier le START II et ne le fit qu’en 2000, et, dans ce cas, pour tenter de sauver le traité ABM que les Yankees, à cette date, n’avaient pas d’intérêt à maintenir.

Les USA s’efforcent d’utiliser leurs énormes ressources médiatiques pour tromper et duper l’opinion publique mondiale.

L’administration étasunienne traverse une étape difficile par suite de ses équipées militaires. Absolument tous les pays de l’OTAN ainsi que, dans une plus ou moins grande mesure, des pays riches et industrialisés comme le Japon et l’Australie, et d’autres du Tiers-monde, sont compromis dans la guerre de l’Afghanistan, dont la boucherie suscite la répugnance et la haine des peuples concernés.

Quelle est l’essence de l’accord signé en avril dernier entre les USA et la Russie ? Les deux parties se sont engagées à réduire le nombre d’ogives nucléaires stratégiques à 1 550.  Des ogives nucléaires que possèdent la France, le Royaume-Uni et Israël et qui peuvent toutes frapper la Russie, pas un mot. Pas un mot non plus des armes nucléaires tactiques dont certaines sont plus puissantes que la bombe qui  rasa Hiroshima. Pas un mot de la capacité destructive de nombreuses armes classiques, des armes radioélectriques et d’autres systèmes d’armements auxquels les USA allouent des sommes toujours accrues, au point que leur budget militaire dépasse aujourd’hui celui de toutes les autres nations du monde ensemble. Les deux gouvernements savent, et peut-être bien d’autres de ceux qui se sont réunis à Lisbonne, qu’une troisième guerre mondiale serait la dernière. Quelles illusions peuvent bien se faire les membres de l’OTAN ? Quelle tranquillité l’humanité peut-elle tirer de cette réunion ? Quel bénéfice peut-elle apporter aux pays du Tiers-monde, voire à l’économie mondiale ?

Ces chefs d’État ne peuvent même pas offrir l’espoir que la crise économique mondiale sera surmontée, ou que la situation s’améliorera et pour combien de temps. La dette publique totale des USA, à savoir non seulement celle du gouvernement fédéral, mais celle des autres institutions publiques et privées, se chiffre d’ores et déjà à 58 billions de dollars, ce qui équivaut au PIB mondial de 2009. Ceux qui se sont réunis à Lisbonne se sont-ils demandé par hasard d’où sortaient ces ressources fabuleuses ? La réponse est pourtant toute simple : de l’économie de tous les autres peuples du monde auxquels les USA ont refilé, unilatéralement, du vulgaire papier converti  en devise qui, depuis quarante ans, n’a plus aucun aval en or dont la valeur est aujourd’hui quarante fois supérieure. Et ce pays dispose toutefois du pouvoir de veto au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale. Pourquoi ces messieurs n’ont-ils pas discuté de tout ça au Portugal ?

L’espoir des USA, de l’OTAN et de leurs alliés de retirer leurs troupes d’Afghanistan est chimérique. Ils devront abandonner ce pays avant de remettre, vaincus, le pouvoir à la résistance afghane. Les alliés mêmes des États-Unis commencent à reconnaître que cette guerre pourrait durer des dizaines d’années. L’OTAN est-elle prête à rester là-bas si longtemps ? Les citoyens de chaque pays impliqué le permettront-ils ? Ces messieurs ne devraient pas oublier qu’un pays très peuplé, le Pakistan partage une frontière commune d’origine coloniale avec l’Afghanistan et qu’une partie pas si négligeable de ses habitants a une origine commune.

Je ne critique pas Medvedev, qui fait bien de tenter de limiter la quantité d’ogives nucléaires braquées sur son pays. Barack Obama, lui, ne peut inventer la moindre justification. Celle selon laquelle ce bouclier nucléaire antimissile, déployé à un coût colossal, vise à protéger l’Europe et la Russie des fusées provenant d’un pays, l’Iran, qui ne possède même pas un engin nucléaire tactique, est tout simplement grotesque. Même les bandes dessinées ne vont pas si loin !

Obama a d’ores et déjà admis qu’il pourrait très bien ajourner sa promesse de retirer les soldats étasuniens d’Afghanistan et que l’impôt sur les grosses  fortunes pourrait être annulé sans retard. Après le Prix Nobel, il faudrait lui concéder celui de « meilleur charmeur de serpents ».

Compte tenu de l’autobiographie de W. Bush qu’un rédacteur intelligent a rédigée à sa place et qui est déjà un best-seller, pourquoi ne lui a-t-on pas fait l’honneur de l’inviter à Lisbonne ? L’extrême droite européenne, le Tea Party de là-bas, en aurait été assurément ravie.

 

Fidel Castro Ruz

Le 21 novembre 2010

20 h 36

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19 novembre 2010 5 19 /11 /novembre /2010 00:50

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Los jóvenes que invitaron a Fidel a recordar el quinto aniversario del discurso en el Aula Magna.

Foto: Alex Castro

La Havane, 17 novembre (RHC-AIN).- Le leader de la Révolution cubaine, Fidel Castro, s’est vu remettre le Prix Alma Mater, que décerne la Fédération des Étudiants.

Fidel a reçu ce prix, octroyé de façon exceptionnelle pour sa contribution aux nouvelles générations, à l’occasion du 65è anniversaire de son entrée à l’université.

Au cours d’un meeting, organisé au Palais des Congrès de notre capitale, pour célébrer la Journée Internationale des étudiants, Maydel Gomez, la Présidente de la FEU a signalé que les jeunes doivent éprouver le besoin de perfectionner la Révolution.

S’adressant aux jeunes cubains, le leader historique de la Révolution cubaine, Fidel Castro, a ratifié les idées exprimées dans le discours qu’il a prononcé au grand amphithéâtre de La Havane, le 17 novembre 2005. Fidel a signalé :
« Je me souviens parfaitement du 17 novembre 2005. On commémorait la Journée Internationale des étudiants. Vous, les Universitaires, vous avez décidé que je parle ce jour-là, car ce jour là marquait aussi le 60è anniversaire de mon entrée à l’université. C’était à la fin 1945, j’étais un peu plus jeune que maintenant. J’avais alors votre âge, mais nous avons vécu ensembles une étape de la vie. Je pensais que cette réunion que nous avions eu à l’Université de La Havane n’allait plus jamais se répéter, mais cela fait à peine deux mois, pour être plus exact, lorsque j’ai présenté, à l’amphithéâtre de l’Université mon second livre sur notre guerre révolutionnaire, « La contre offensive stratégique » le 10 septembre 2010 que l’occasion s’est répétée. À la fin j’ai bavardé avec des vétérans de ces luttes et à la sortie, j’ai salué un groupe de dirigeants des étudiants qui m’attendaient. J’ai échangé quelques idées avec eux. Ils m’ont dit qu’ils attendaient le 17 pour que je parle de ce discours. Ils voulaient écouter de nouveau mes réflexions sur les idées que j’avais exprimées ce jour-là.

Il m’a semblé que trop de temps s’écoulerait entre le 10 septembre et le 17 novembre. D’autres idées sont passées par ma tête, mais j’ai alors répondu : Nous nous reverrons là bas. Je savais que ce discours avait soulevé une polémique. Nous vivions des moments difficiles face à un ennemi qui nous menaçait, qui bloquait plus durement notre économie, qui s’efforçait de semer le mécontentement en promouvant la désertion et les sorties illégales du pays, le privant ainsi d’une force de travail jeune, bien préparée techniquement et culturellement ».

Dans une autre partie de sa rencontre avec les étudiants cubains, Fidel a évoqué l’université de son temps.

« À ce moment là ce n’était pas une université des humbles, mais des couches moyennes de la population, c’était aussi l’université des riches. Plusieurs des jeunes qui y entraient avaient des idées bien plus avancées que celles de leur classe sociale. Un grand nombre d’entre eux étaient prêts à lutter et ils l’ont fait tout au long de l’histoire. Julio Antonio Mella était un de ces jeunes qui venaient de la classe moyenne. Ceux des couches les plus pauvres, les enfants des paysans ne savaient ni lire ni écrire. J’ai mentionné Julio Antonio Mella comme j’aurai pu mentionner Antonio Guiteras, Rafael Trejo ou ce jeune de Matanzas qui avait été baptisé Manzanita, toujours jovial, souriant, qui s’est fait remarquer par son courage lorsqu’il affrontait la police: José Antonio Echeverría ».

Fidel a avoué qu’il est impressionné par l’actualité des idées qu’il a exprimées il y a 5 ans dont plusieurs concernaient l’avenir. Les faits se sont produits tels que prévus -a-t-il dit.

Fidel a souligné que seules les connaissances sur des phénomènes comme le changement climatique, la crise économique qui n’a pas de précédent, les dangers de guerre et la dérivation du pouvoir impérial vers le fascisme, exigent des universitaires, un plus grand dévouement.

Dans son message aux étudiants cubains, Fidel a rappelé qu’il y a 5 ans il a demandé quel monde était celui ou un empire barbare proclamait le droit d’attaquer une soixantaine de pays, était capable de porter la mort à n’importe quel coin du monde, en utilisant les armes et les techniques pour tuer les plus sophistiquées.

Fidel a expliqué que maintenant l’Empire menace d’attaquer l’Iran s’il produit du combustible nucléaire et qu’au niveau international on débat de l’heure et de la date de l’attaque, on décide si, comme dans le cas de l’Irak, le satellite israélien pour le bombardement préventif sera utilisé pour attaquer soudainement des centres de recherche concernant la production de combustible nucléaire.

Fidel a défendu le droit de l’Iran de produire du combustible nucléaire comme n’importe quel autre pays industrialisé. Pourquoi l’obliger à détruire sa réserve d’une matière première qui sert non seulement comme source énergétique, mais à de nombreuses autres fins.

Il faudra voir ce qui se passe s’ils décident de bombarder l’Iran- a précisé le leader cubain.

Dans son message, Fidel a ajouté que Cuba n’a jamais tenté de produire d’armes nucléaires, car son peuple possède d’autres types d’armes qui sont ses idées et qu’il oppose au pouvoir de l’armement nucléaire.

Fidel Castro a indiqué que Cuba n’a jamais cherché à produire d’armes biologiques, mais des armes pour combattre la mort, le SIDA, les maladies, le cancer. C’est au développement de ces produits que Cuba consacre ses ressources- a précisé Fidel avant d’ajouter.

« Nous voici, à quelques kilomètres de cet empire colossal, le plus puissant qui n’a jamais existé. 46 ans se sont écoulés. Il est plus loin que jamais de faire plier, de mettre à genou la nation cubaine, celle même qu’il a humiliée et offensée durant un certain temps. Je crois que c’est Ignacio Agramonte, d’autres disent que c’est Carlos Manuel de Céspedes qui, en réponse aux pessimistes, lorsqu’ils étaient seulement 12 hommes avait dit: Avec 12 hommes on fait un peuple.

Ce qui s’appelle conscience révolutionnaire qui est l’addition de nombreuses consciences est la fille de l’amour à la Patrie, de l’amour au monde, car il ne faut pas oublier que la Patrie c’est l’Humanité ».

Se référant à l’avenir de Cuba, Fidel Castro a signalé :
« Le pays aura bien plus de ressources, mais ce ne sera jamais une société de consommation. Ce sera une société de connaissances, de culture, de développement humain le plus extraordinaire, de développement de la culture, de l’art, de la science. Avec une liberté pleine.»

 

 

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19 novembre 2010 5 19 /11 /novembre /2010 00:34

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Fidel, con Maidel Gómez, presidenta de la FEU (a la izquierda) y la primera secretario de la UJC, Liudmila Álamo

. Foto: Alex Castro.D'autres photos sur Cubadebate

Chers étudiants et autres invités,

Je me réjouis beaucoup de la présence à cette réunion du ministre de l’Enseignement supérieur, des recteurs des universités de La Havane, d’une représentation de l’Union des jeunes communistes conduite par sa première secrétaire, de la direction provinciale et de la direction nationale de la Fédération des élèves de l’enseignement secondaire.

Je me rappelle bien ce 17 novembre 2005. Journée internationale de l’étudiant. Vous aviez décidé, vous les universitaires, que je devais prendre la parole ce jour-là, qui marquait, m’avait-on dit, le soixantième anniversaire de mon entrée à l’Université, fin 1945. J’étais alors un peu plus jeune qu’aujourd’hui ; j’avais votre âge. Mais nous avons vécu ensemble une étape de la vie.

Je pensais qu’une réunion comme celle que nous avons eue à l’Université de La Havane voilà cinq ans ne se répéterait plus. J’avais déjà soixante-dix-neuf ans. Mais quand, voilà deux mois à peine, le 10 septembre, pour être plus exact, j’ai présenté mon second livre sur notre guerre révolutionnaire dans le Grand Amphi, La Contraofensiva Estratégica, j’en ai profité pour converser avec des nombreux anciens combattants de ces luttes et, en sortant de la salle, pour saluer un groupe enthousiaste de dirigeants étudiants qui m’attendaient et qui m’ont expliqué, durant notre échange, qu’ils attendaient avec impatience ce 17 novembre pour que je leur parle de mon discours d’alors.

Ce groupe m’a plu. Il ne réclamait pas une « révolution culturelle », il souhaitait écouter des réflexions de ma part sur les idées que j’avais exposées ce jour-là.

Cette rencontre était désormais leur propriété. Il me semblait que bien du temps nous séparait de ce 17 novembre, j’avais bien d’autres idées en tête et je leur ai répondu : « Rendez-vous ce jour-là, donc. »

Je savais bien entendu que ce discours-là avait fait grincer des dents, étant donné le moment que nous vivions alors face à un puissant ennemi qui nous menaçait de plus en plus, imposait un blocus féroce à notre économie et s’efforçait de semer le mécontentement en fomentant la violation des lois et les départs illégaux du pays, nous privant d’une réserve de force de travail jeune, bien formée des points de vue culturel et technique, et dont beaucoup étaient entraînés ensuite à des activités illicites et à la délinquance.

J’avais aussi fait preuve d’autocritique et d’ironie au sujet de nos propres actions. Tout en étant caustique, j’avais défendu des principes et je n’avais pas fait de concessions.

Je me rappelais tout ceci, bien entendu, mais non les mots exacts que j’avais employés, ni la totalité des arguments que j’avais avancés, ni la durée de ce discours.

J’en ai donc demandé une copie aux archives du Conseil d’État, et j’ai constaté qu’il faisait cent quinze pages à interligne simple, soit deux cents comme celles-ci qui en font une quarantaine.

Ces dernières semaines, j’ai eu beaucoup de travail pour différentes raisons, dont mes réunions avec le directeur principal du site web Global Research, Michel Chossudovsky ; la victoire électorale écrasante de l’extrême droite aux États-Unis, entre autres celle du groupe fasciste du Tea Party ; la crise économique sans précédents ; la guerre des devises, suivie de près par le Sommet du G-20 à Séoul et le Sommet de l’APEC à Yokohama, au Japon ; et, dans deux jours, les 19 et  20 novembre, le Sommet de l’OTAN au Portugal qu’il faut suivre de près.

Je ne me résignais pourtant pas à ajourner la date de notre rencontre, voire à annuler celle-ci.

Me basant sur mon discours d’alors, j’ai en tiré textuellement les idées essentielles, tout en omettant, pour gagner du temps, les nombreuses exemples qui soutenaient mes vues.

Je dois avouer ma surprise devant le fait que ces idées-là sont, cinq ans après, plus actuelles que jamais, car beaucoup ont à voir avec le futur, et que les événements m’ont donné raison. La seule différence que les connaissances disponibles aujourd’hui sur des phénomènes tels que les changements climatiques, la crise économique pire que toutes les précédents, les dangers d’une guerre et le dérapage du pouvoir impérial vers le fascisme exigent des universitaires le maximum de concentration et d’effort dans la bataille idéologique,

L’une des premières idées que j’ai exprimées est la suivante :

« L’ensemble de facteurs qui ont rendu la vie possible a joué au bout de milliards d’années sur la planète Terre. Cette vie fragile n’a pu se développer que dans des fourchettes de températures limitées, entre quelques degrés en dessous de zéro et quelques degrés au-dessus de zéro… 

           «  J’essayais de me rappeler comment étaient ces universités-là, à quoi nous nous consacrions, de quoi nous nous inquiétons. Nous nous inquiétons… de cette petite île. On ne parlait pas encore de mondialisation, la télévision n’existait pas, l’Internet non plus, pas plus que les communications instantanées d’un bout à l’autre de la planète… En tout cas, à l’époque, vers 1945, nos avions de passagers arrivaient à peine à Miami…

« Une guerre terrible venait juste de se terminer qui a coûté environ cinquante millions de morts. Je parle de 1945, l’année où je suis entré à l’université, le 4 septembre. Oui, parce que c’est le 4 septembre que j’y suis entrée, mais vous avez pris ensuite la liberté de fêter cet anniversaire n’importe quel jour… »

Puis, je me suis demandé :

« Quel monde que le nôtre ! Quel monde que le nôtre où un empire barbare proclame son droit d’attaquer par surprise et à titre préventif une soixantaine de pays du monde ou plus, qui est capable de porter la mort à n’importe quel coin du monde en recourant aux armes et aux techniques de mort les plus perfectionnées !

[…]

« Aujourd’hui même, l’Empire menace d’attaquer l’Iran si celui-ci produit du combustible nucléaire.

[…]

« Si bien qu’on discute dans l’arène internationale à quel jour ou à quelle heure ça se fera, si ce sera l’Empire qui le fera, ou s’il utilisera, comme il l’a fait en Iraq, son satellite israélien pour bombarder de manière préventive et par surprise les centres de recherche iraniens qui mettent au point la technique de production du combustible nucléaire.

« …cette nation-là réclame le droit de produire du combustible nucléaire comme n’importe quelle nation industrielle, sans avoir à épuiser ses réserves d’une autre matière première qui sert à produire non seulement de l’énergie, mais de nombreux autres produits, des engrais, des textiles, une foule de choses d’usage universel.

« …Et on verra bien ce qu’il se passera s’ils se mettent à bombarder l’Iran pour détruire des installations qui lui permettent de produire du combustible nucléaire.

« Nous n’avons jamais parlé de la possibilité de fabriquer des armes nucléaires… Nous possédons un autre genre d’armes nucléaires : nos idées. […] nos armes morales qui sont invincibles. Voilà pourquoi nous n’avons jamais eu l’idée de fabrique … des armes biologiques. […] À quoi bon ? Des armes, oui, pour combattre la mort, pour combattre le sida, pour combattre les maladies, pour combattre le cancer. Voilà à quoi nous consacrons nos ressources…

« […] On découvre maintenant partout dans le monde des prisons secrètes où les défenseurs des droits de l’homme torturent : ce sont les mêmes qu’on retrouve à Genève votant à la queue leu leu, comme des moutons, contre Cuba, le pays qui ne connaît pas la torture, ce qui est tout à l’honneur et à la gloire de cette génération, à l’honneur et à la gloire de cette Révolution, à l’honneur et à la gloire d’un pays qui se bat pour la justice, pour l’indépendance, pour la dignité humaine, et qui doit préserver sans tache sa pureté et sa dignité !

« […] On a appris ce matin que l’Empire avait utilisé du phosphore blanc sur Falloudjah, quand il a constaté qu’il ne parvenait pas à vaincre un peuple pratiquement désarmé, au point que les envahisseurs ne pouvaient ni partir ni rester : s’ils partaient, les combattants rebelles revenaient ; s’ils restaient, ils ne pouvaient envoyer ces troupes ailleurs où ils en avaient besoin. Plus de deux mille jeunes soldats étatsuniens sont déjà morts, et certains se demandent : jusqu’à quand continueront-ils de mourir dans une guerre injuste… ?

« …Il a donc dû transformer l’enrôlement en une source d’emploi, engager des chômeurs, et il tente bien souvent d’engager le plus grand nombre possible d’Afro-américains dans ses guerres injustes. Mais on finit par apprendre que toujours moins de Noirs sont disposés à s’engager dans l’armée, malgré le chômage et la marginalisation dont ils sont victimes…

« […] L’Empire a besoin de Latinos, d’émigrants, et ceux-ci, pour tenter d’échapper à la faim, franchissent la frontière mexicaine. Plus de cinq cents meurent chaque année en tentant de franchir la frontière, autrement dit bien plus en douze mois que ceux qui sont morts en vingt-huit ans au fameux mur de Berlin.

« …Voilà comment les jeunes gens entraient dans cette université qui n’était pas, soit dit en passant, l’université des humbles : c’était l’université des classes moyennes, l’université des riches, même si les jeunes étaient généralement au-dessus des idées de leur classe et si beaucoup d’entre eux étaient capables de se battre, de la même manière qu’ils se sont battus tout au long de l’histoire de Cuba.

           «  Les huit élèves de médecine fusillés en 1871 ont été les fondements des plus nobles sentiments et de l’esprit de rébellion de notre peuple…

« … Mella était issu lui aussi des couches moyennes, ce qui est logique parce que ceux des classes les plus pauvres, les fils de paysans, les fils d’ouvriers ne savaient ni lire ni écrire.

« J’ai mentionné Mella, mais je pourrais mentionner Guiteras, je pourrais mentionner Trejo qui est mort au cours d’une des manifs contre Machado, un 30 septembre…

« …Quand la tyrannie de Batista s’est de nouveau implantée dans toute sa rigueur, de nombreux étudiants se sont battus et de nombreux étudiants sont morts. Je me rappelle ce jeune homme de Cárdenas, Manzanita, comme on l’appelait, toujours souriant, toujours jovial, toujours affectueux avec les autres, qui se distinguait par son courage, par sa fermeté… quand il se heurtait à la police.

« Si vous visitez la maison de José Antonio Echeveria, vous pouvez constater que c’est une excellente maison. Ce qui veut dire que les étudiants dépassaient très souvent leur origine sociale, leur origine de classe, parce que c’est un âge où l’on a beaucoup d’espoir, beaucoup de rêves.

« De toute façon, cette université ne comptait qu’une seule faculté de médecine, un seul CHU, et beaucoup décrochaient des prix de médecine, voire de chirurgie, sans avoir jamais fait une seule opération.

« Certains y parvenaient… C’est ainsi que de bons médecins sont apparus. Pas un tas de bons médecins, non, n’allez pas croire. Il y en avait un tas… qui étaient au chômage. Au triomphe de la Révolution, beaucoup sont de fait partis aux USA, et il n’en est resté que la moitié ; trois mille et le quart de professeurs.

« C’est de là que notre pays a dû partir pour devenir quasiment la capitale de la médecine mondiale.

« Notre pays compte… plus de soixante-dix mille médecins.

« …Je suis entré à l’Université presque fin 1945 et j’ai lancé la lutte armée à la Moncada, le 26 juillet 1953, de fait, presque huit ans après. Et la Révolution triomphe cinq ans, cinq mois et cinq jours après la Moncada, au terme d’un long trajet de prisons, d’exile, de lutte dans les montagnes.

« …nous ne connaissions même pas bien les lois de la gravité, nous grimpions en luttant contre l’Empire, qui était déjà le plus puissant, mais face auquel il existait une autre superpuissance… Et c’est en grimpant, en escaladant, que nous avons pris de la bouteille, que notre peuple s’est fortifié, ainsi que notre Révolution, pour en arriver où nous en sommes maintenant.

« …l’homme est le seul capable… de passer par-dessus tous les instincts… la nature lui impose des choses à travers les instincts… la nature lui impose les instincts, et l’éducation lui impose les vertus…

« …malgré les différences entre eux, les êtres humains peuvent ne faire qu’un à un moment donné, et ce, grâce aux idées… ils peuvent être des millions.

« Ce sont les idées qui nous unissent, ce sont les idées qui font de nous un peuple combattant, ce sont les idées qui nous font, non seulement individuellement mais collectivement, révolutionnaires. Et c’est quand la force de tous s’unit qu’un peuple ne peut plus être vaincu…

« …nous sommes un pays minuscule, ici, à cent cinquante kilomètres de l’Empire colossal, de l’Empire le plus puissant qui ait jamais existé dans l’Histoire et qui, quarante-six ans après, est de moins en moins capable de faire plier la nation cubaine, cette nation qu’il a offensée et humiliée durant quelque temps.

« C’est Agramonte, je crois – d’autres parlent de Céspedes – qui, répondant aux pessimistes, alors qu’il n’avait que douze hommes avec lui, s’est exclamé : "…avec douze hommes, on fait un peuple."… ce qu’on appelle une conscience révolutionnaire, qui est la somme de bien des consciences. […] qui est la fille de l’amour de la patrie et de l’amour du monde, qui n’oublie pas cette idée avancée voilà plus de cent ans : la patrie est l’humanité.

« Nous ne devons jamais oublier ceux qui, durant tant d’années, ont été notre classe ouvrière et travailleuse, qui ont vécu les décennies de sacrifice, qui ont lutté contre les bandes mercenaires dans les montagnes, contre les invasions style Playa Girón, contre les milliers de sabotages qui ont coûté tant de vies à nos travailleurs agricoles et sucriers, à nos travailleurs industriels, ou commerciaux, ou ceux de la marine marchande ou de la pêche qui se voyaient tout d’un coup attaqués à coups de bazooka ou de canon, uniquement parce qu’ils étaient Cubains, parce que nous voulions notre indépendance, uniquement parce que nous voulions améliorer le sort de notre peuple…

« Cuba prend la parole quand elle doit la prendre et Cuba a des tas de choses à dire, mais elle est ni pressée ni impatiente. Elle sait très bien quand, où et comment il faut frapper l’Empire, son système et ses laquais.

« Je pense… que cette humanité et les grandes choses qu’elle est capable de créer doivent être préservées tant que faire se peut. […]

« …ce peuple admirable et merveilleux, hier semence et aujourd’hui arbre aux racines profondes, hier plein de noblesse en puissance et aujourd’hui plein de noblesse réelle, hier plein de connaissances en rêve et aujourd’hui plein de connaissances réelles, quand il vient à peine d’entrer dans cette gigantesque université qu’est Cuba aujourd’hui.

« Et voyez comment sont apparus de nouveaux cadres, et des cadres jeunes.

« Nous sommes engagés, vous le savez, dans une bataille contre les vices, contre le détournement de ressources, contre le vol…

« Mais n’allez pas penser que le vol de matériaux et de ressources date d’aujourd’hui ou de la Période spéciale. Celle-ci l’a aggravé, parce qu’elle a causé beaucoup d’inégalité et a permis à beaucoup de gens d’avoir beaucoup d’argent.

« …À l’époque dont je vous parle, il fallait huit cents kilos de ciment pour produire une tonne de béton, de bon béton… Or, en fait, il en faut seulement deux cents kilos. Voyez un peu comment on gaspillait, comment on détournait des ressources, comment on volait !

« Dans cette bataille contre les vices, il n’y aura de trêve contre personne… et nous ferons appel au sens de l’honneur de chaque secteur. Car nous sommes certains qu’il existe une dose élevée d’honneur en chaque être humain. Quand on est seul devant soi, on n’est généralement pas un juge sévère, bien que, de mon point de vue, le premier devoir d’un révolutionnaire soit d’être extrêmement sévère contre lui-même.

« La critique et l’autocritique, c’est tout à fait correct, parce que ça n’existait pas auparavant, mais si nous allons mener une bataille, alors il faut utiliser des projectiles de plus gros calibre, il faut faire la critique et l’autocritique dans la salle de classe, dans la cellule du parti et ensuite hors de la cellule, et après dans la commune et après dans le pays.

« On peut aussi poser d’autres questions. Combien gagnons-nous ?  Et à partir de cette question, on commencerait à comprendre le rêve que chacun vive de son salaire ou de sa très juste pension.

« …je peux vous assurer que nous avons pris conscience et que toute la vie est un apprentissage, jusqu’à la dernière seconde, et bien des choses, vous commencez à les voir à un moment.

« J’ai tiré une conclusion au bout de bien des années : parmi les nombreuses erreurs que nos avons tous commises, la plus grosse a été de croire que quelqu’un savait ce qu’était le socialisme, ou comment on fait le socialisme. Ça semblait une science toute mâchée, autant que le système électrique conçu par certains qui s’estimaient des experts en la matière. […] En tout cas, nous sommes des idiots si nous croyons, par exemple, que l’économie – et que les dizaines de milliers d’économiste de notre pays me pardonnent – est une science exacte et éternelle, qu’elle remonte à Adam et Ève.

« Vous perdez tout votre sens de la dialectique si vous croyez que cette économie d’aujourd’hui est la même qu’il y a cinquante ans, ou cent ans ou cent cinquante ans, qu’elle est pareille qu’à l’époque de Lénine ou à celle de Karl Marx. Je suis à mille lieues d’être un révisionniste, je rends un vrai culte à Marx, à Engels et à Lénine.

« Après, j’ai découvert que j’étais un communiste utopique, parce que toutes mes idées avaient pour point de départ : « "Ceci n’est pas bien, ceci est mauvais, ceci est insensé… Comment les crises de surproduction peuvent-elles arriver, et la faim, quand il y a plus de charbon, plus de froid, plus de chômeurs, puisqu’il y a justement plus de capacités de créer des richesses. Ne serait-il pas plus simple de leur produire et de les distribuer ?"

« Il semblait à cette époque, tout comme il semblait à Karl Marx dans son Programme de Gotha, que les limites de l’abondance sociale reposaient dans le système social, qu’à mesure que les forces productives se développaient, les hommes pouvaient produire quasiment sans limites tout ce dont ils avaient besoins pour assouvir ses besoins essentiels de type matériel, culturel, etc.

« Quand vous lisez des livres politiques comme Le 18-Brumaire ou Les luttes civiles en France, vous vous rendez compte que vous êtes devant un génie, que ses interprétations étaient extrêmement claires. Son Manifeste communiste est un grand classique. Vous pouvez l’analyser, et vous pouvez être plus ou moins d’accord avec telle ou telle chose, mais vous êtes bien forcés de le reconnaître.

« Je suis passé du communisme utopique à un communisme qui se fondait sur des théories sérieuses du développement social…

« Tout stratège et tacticien révolutionnaire doit concevoir une stratégie et une tactique qui conduise à l’objectif clef : changer ce monde réel, parce qu’il faut le changer. Mais aucune tactique ou stratégie qui désunisse n’est bonne.

« J’ai eu le privilège de connaître certains théologiens de la Libération au Chili, quand j’ai rendu visite à Allende en 1971. J’y ai rencontré de nombreux prêtres et des représentants de différentes religions, et leur idée était de joindre des forces et de lutter, indépendamment de leur foi religieuse.

« Le monde a désespérément besoin d’unité, et si nous n’en obtenons pas un minimum, nous n’aboutirons nulle part.

« Lénine a surtout étudié les questions de l’État ; Marx n’avait pas parlé de l’alliance ouvrier-paysan parce qu’il vivait dans un pays à grand essor industriel. Lénine, lui, a connu le monde sous-développé, a vu ce pays où de 80 à 90 p. 100 des gens étaient paysans, même s’il y existait une puissante force ouvrière dans les chemins de fer et dans certaines industries ; et il a constaté avec une clarté absolue la nécessité de cette alliance entre les ouvriers et les paysans, ce dont personne n’avait encore parlé. Tout le monde avait philosophé, mais personne n’en avait parlé. Et c’est dans un immense pays semi-féodal, semi-sous-développé qu’éclate la première révolution socialiste, la première tentative véritable de créer vraiment une société égalitaire et juste, puisque aucune des précédentes – esclavagiste, féodale, médiévale ou antiféodale, bourgeoise, capitaliste – même si la société bourgeoise a beaucoup parlé de liberté, égalité et fraternité, ne s’est jamais proposé de fonder une société juste.

« Le premier effort sérieux de l’homme tout au long de l’Histoire pour créer une société juste date de moins de deux cents ans…  

« On ne serait jamais arrivé à une stratégie en faisant preuve de dogmatisme. Lénine nous a beaucoup appris à cet égard. Marx nous a appris à comprendre la société ; Lénine nous a appris à comprendre l’État et son rôle.

           « …quand l’URSS s’est effondrée, bien de gens se sont retrouvés seuls, entre autres nous, les révolutionnaires cubains. Mais nous savions ce que nous devions faire, quels étaient nos choix. Les autres mouvements révolutionnaires continuaient de se battre à bien des endroits. Et certains – je ne vais pas dire lesquels, mais il s’agissait de mouvements très sérieux – nous ont demandé s’ils devaient continuer de se battre ou s’ils devaient négocier dans cette situation désespérée avec leurs adversaires à la recherche de la paix, alors que tout le monde savait où menait cette paix.

            « Je leur disais : "Vous ne pouvez pas nous demander notre opinion, car c’est vous qui vous battez, c’est vous qui mourez, pas nous. Nous savons ce que nous ferons et nous sommes prêts à le faire, mais vous êtes les seuls à pouvoir en décider." Nous avons fait preuve du plus grand respect envers les autres mouvements, nous n’avons jamais tenté, profitant de notre expérience et de nos connaissances et de l’immense respect qu’ils sentaient envers notre Révolution, de leur imposer nos points de vue.

            « Je pense que l’expérience du premier État socialiste – qu’il aurait fallu arranger, et non détruire – a été très amère. N’allez pas croire que je n’ai pas pensé très souvent à ce phénomène terrible par lequel l’une des plus grande puissances au monde, qui avait réussi à équilibrer ses forces avec celles de l’autre superpuissance, le pays qui avait payé de la vie de plus de vingt millions de ses citoyens sa victoire sur le fascisme, le pays qui avait écrasé celui-ci, a fini par s’effondrer comme il s’est effondré.

            « Les révolutions sont-elles vouées à l’effondrement, ou est-ce que ce sont les hommes qui peuvent les faire s’effondrer ? Les hommes peuvent-il empêcher ou non, la société peut-elle empêcher ou non les révolutions de s’effondrer ? Je pourrais ajouter tout de suite une autre question : croyez-vous que cette Révolution socialiste-ci puisse s’effondrer ? (Exclamations de : « Non ! ») Y avez-vous pensé une fois ? Y avez-vous pensé en profondeur ?

« Connaissiez-vous toutes ces inégalités de notre société dont je vous parle ? Connaissiez-vous certaines habitudes généralisées ? Saviez-vous que certains gagnaient tous les mois de quarante à cinquante fois plus qu’un médecin, de ceux qui font partie du contingent Henry Reeve et qui soignent dans les montagnes guatémaltèques ? Ou même encore plus loin, en Afrique, ou à des milliers de mètres d’altitude, sur les contreforts de l’Himalaya, et qui sauvent des vies ? Et qui gagnent 5 ou 10 p. 100 de ce que gagne un de ces gangsters qui vendent de l’essence aux nouveaux riches, qui détournent des ressources des ports par camions entiers et par tonnes entières, qui volent dans les magasins vendant en devises, qui volent dans les hôtels cinq étoiles, au mieux en remplaçant une bouteille de très bon rhum par une autre de bien moindre qualité et vendant ensuite au prix fort son contenu au détail, par verres.

« On peut aussi s’expliquer pourquoi nous ne coupons plus la canne à la main aujourd’hui. De leur côté, les lourds engins détruisent les plantations. De plus, à quoi bon la couper, puisque les abus et les subsides du monde développé ont fait chuter les cours du sucre sur le marché mondial à des niveaux dérisoire, tandis que l’Europe le paie à ses agriculteurs deux ou trois fois plus cher.

            « Donc, nous devons nous poser cette question – en tout cas, moi, je me la suis posée depuis bien longtemps – de l’effondrement d’une révolution face à l’Empire hyperpuissant qui est à l’affût, qui nous menace, qui a mis au point des plans de transition politique et des plans d’action militaire dans l’attente d’un moment déterminé.

            « Ces gens-là attendent un phénomène naturel et absolument logique : un décès. En l’occurrence, ils me font l’honneur considérable de penser à moi. C’est avouer en tout cas qu’ils n’ont pu rien faire depuis bien longtemps ! Si j’étais vaniteux, je pourrais être fier que ces sinistres individus soient obligés d’avouer qu’ils doivent attendre ma mort. Ils attendent donc que je meure, ce qui ne les empêche pas d’inventer tous les jours quelque chose : Castro a ceci, Castro a cela. dernière invention, c’est que Castro a la maladie de Parkinson…

            « Oui, j’ai fait une très forte chute, et je suis toujours en train de me rétablir de ce bras (il le signale) et je vais mieux. En fait, je devrais me réjouir de cette fracture du bras parce qu’elle m’a contraint à encore plus de discipline, à encore plus de travail, à consacrer plus de temps, presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre, à mon travail. Si je le faisais avant, je lui consacre maintenant chaque seconde et je me bats plus que jamais…

« Exactement comme la crapule [je parlais de la revue Forbes]  qui a découvert que j’étais l’homme le plus riche du monde.

« Je vous ai posé une question, compañeros étudiants, que je n’ai pas oubliée, tant s’en faut, et je prétends que vous ne l’oubliiez jamais non plus, parce que c’est une question qui se pose toute seule face aux expériences historiques que nous avons connues. Oui, je vous demande à tous, sans exception, d’y réfléchir : une révolution peut-elle être ou non irréversible ? Quelles seraient les idées ou quel serait le degré de conscience qui rendrait impossible la régression d’une révolution ?

« Il est énorme, le pouvoir d’un dirigeant quand il jouit de la confiance des masses, quand celles-ci confient en ses capacités. Mais elles sont terribles, aussi, les conséquences d’une erreur de la part de ceux qui ont le plus d’autorité, et c’est arrivé plus d’une fois dans les révolutions.

« Ce sont là des choses sur lesquelles on réfléchit. On étudie l’histoire : que s’est-il passé ici, ou là, ou là encore, on réfléchit sur ce qui est arrivé aujourd’hui et sur ce qui arrivera demain, on se demande où va chaque pays, où ira le nôtre, comment il marchera, quel rôle jouera Cuba…

« Voilà pourquoi j’ai dit que l’une de nos plus grandes erreurs au début et bien souvent tout au long de la Révolution a été de croire que quelqu’un savait comment on édifiait le socialisme.

« Quelle serait donc notre société si, quand nous nous réunissons dans un endroit comme celui-ci, en un jour comme celui-ci, nous ne savions pas un minimum de ce que nous devons savoir afin que cette île héroïque, ce peuple héroïque, ce peuple qui a écrit des pages que nul autre n’a encore écrites dans l’histoire de l’humanité, préserve sa Révolution ? Ne pensez pas que celui qui vous parle est un vaniteux, un charlatan, un bluffeur.

« Quarante-six ans se sont écoulés, et on connaît l’histoire de ce pays. En tout cas, ses habitants la connaissent. Et celle, aussi, de cet Empire voisin, sa grandeur, son pouvoir, sa force, sa richesse, sa technologie, sa domination sur la Banque mondiale, sa domination sur le Fonds monétaire, sa domination sur les finances mondiales, cet Empire qui nous a imposé le blocus le plus rigoureux et le plus incroyable, que les Nations Unies viennent de repousser une fois de plus par cent quatre-vingt-deux voix, s’exprimant librement malgré les risques qu’entraîne un vote déclaré contre l’Empire.

« Non seulement nous avons fait et maintenu cette Révolution à nos risques et périls pendant tout un tas d’années, mais nous étions même convaincu à un moment donné que si les États-Unis nous attaquaient un jour directement, ce camp socialiste ne lutterait jamais pour nous et que nous ne pouvions même pas le lui demander !

« Non seulement nous avons fait et maintenu cette Révolution à nos risques et périls pendant tout un tas d’années, mais nous étions même convaincu à un moment donné que si les États-Unis nous attaquaient un jour directement, ce camp socialiste ne lutterait jamais pour nous et que nous ne pouvions même pas le lui demander ! Compte tenu du perfectionnement des techniques modernes, il était naïf de penser que cette grande puissance – ou de le lui demander ou de l’attendre – lutterait contre l’autre si celle-ci intervenait dans la petite île se trouvant à cent cinquante kilomètres, et nous sommes arrivés à la conviction absolue que ce soutien ne nous serait jamais accordé. Bien mieux, nous le lui avons demandé un jour directement, plusieurs années avant sa disparition : « Dites-le-nous franchement. » La réponse a été celle que nous attendions : non. Dès lors, nous avons accéléré plus que jamais le développement de notre conception et nous avons perfectionné les idées stratégiques et tactiques à partir desquelles notre Révolution avait triomphé et vaincu, alors qu’elle ne pouvait disposer au départ que de sept hommes armés, un ennemi qui pouvait compter sur quatre-vingt mille hommes, entre marins, soldats, policiers, etc., sur des chars, des avions et sur tout l’armement moderne de l’époque. Oui, la différence entre nos armes et celle de ces forces armées, entraînées par les USA, soutenues par les USA, équipées par les USA, était infinie.

« …aujourd’hui, nous avons bien plus de sept fusils : nous avons tout un peuple qui a appris à manier les armes ; tout un peuple qui, malgré nos erreurs, possède un tel niveau de culture, de connaissances et de consciences qu’il ne permettra jamais que son pays redevienne leur colonie.

« Ce pays-ci peut s’autodétruire ; cette Révolution-ci peut se détruire. Ceux qui ne peuvent pas la détruire, ce sont eux ; nous, en revanche, nous pouvons le faire, et ce serait notre faute.

« J’ai eu le privilège de vivre longtemps. Ce n’est pas un mérite, bien entendu, mais ça m’offre l’occasion exceptionnelle de vous dire ce que je viens de vous dire, de le dire à tous les dirigeants de l’Union des jeunes communistes, à tous les dirigeants des organisations de masse, à tous les dirigeants du mouvement ouvrier, à ceux des Comités de défense de la Révolution, de la Fédération des femmes cubaines, des paysans, de l’Organisation des combattants de la Révolution organisés partout, aux combattants qui durant tant d’années, par centaines de milliers, ont rempli de glorieuses missions internationalistes…

« Que c’est impressionnant de voir les secteurs sociaux les plus modestes de ce pays convertis en vingt-huit mille travailleurs sociaux et en des centaines de milliers d’étudiants ! Quelle force ! Et nous verrons bientôt en action ceux qui ont reçu leur diplôme voilà pas longtemps à la Cité des sports.

« La Cité des sports nous enseigne au sujet du marxisme-léninisme ; la Cité des sports nous enseigne au sujet des classes sociales ; la Cité des sports a réuni voilà peu environ quinze mille médecins et élèves de médecine et certains élèves de l’École latino-américaine de sciences médicales, et d’autres qui sont venus de Timor-Leste pour faire des études de médecine. Un spectacle inoubliable ! Je ne crois pas que ce soit mon seul sentiment.

« Cette société-ci n’oubliera jamais ce spectacle des quinze mille blouses blanches qui se sont réunis là le jour où les élèves de médecine ont reçu leur titre, le jour de la création du contingent Henry Reeve dont une bonne quantité de membres sont déjà partis à des endroits où ont eu lieu des catastrophes exceptionnelles, et ce bien plus tôt que nous ne l’aurions pensé.

« Je dois vous dire que le capital humain est – ou du moins le devient à toute allure – la ressource la plus importante du pays, bien supérieur à presque toutes les autres ensemble. Je n’exagère pas.

« … on a découvert des stations-service clandestines alimentées de l’essence qu’apportaient des chauffeurs de camion-citerne !

« On sait en tout cas que beaucoup de camionneurs publics vont où ils veulent, et celui qui en fait le moins va rendre visite avec à un parent, à un ami, à la famille, à la petite amie.

« Je me souviens d’une anecdote datant de bien avant la Période spéciale : je roulais sur la 5e avenue quand j’ai vu passer à toute allure une rétrochargeuse Volvo flambant neuf, qui valait à cette époque de cinquante à soixante mille dollars. Je suis piqué par la curiosité et je demande à mon garde-corps : « Freine-le et demande-lui où il allait à une telle allure. Qu’il réponde franchement. » Et l’homme a avoué qu’il allait rendre visite à sa fiancée, sur ce Volvo qui roulait à toute allure sur la 5e avenue…

« Ah, si les pierres pouvaient parler !

            « Oui, des choses de ce genre se passaient. En règle générale, nous savons tout. Et beaucoup se disaient : « La Révolution ne peut rien faire, c’est impossible qu’on puisse arranger ça. » Eh bien, moi je vous dis que c’est le peuple qui va arranger ça, que c’est la Révolution qui va arranger ça. Comment ? Est-ce seulement une question d’éthique ? Oui, c’est avant tout une question d’éthique, mais c’est aussi une question économique vitale.

« Nous sommes un des peuples de la Terre qui gaspillent le plus d’énergie combustible. On vient de le prouver ici, et vous l’avez dit très honnêtement, ce qui est très important : personne ne sait ce que coûte l’électricité, personne ne sait ce que coûte l’essence, personne ne sait leur valeur sur le marché. Et c’est très triste, parce que la tonne de pétrole peut atteindre maintenant quatre cents dollars et celle d’essence cinq cents, ou six cents, ou sept cents, et parfois jusqu’à mille dollars, et que c’est un produit dont les cours ne vont pas descendre, sauf dans certaines circonstances données et pas pour longtemps, parce que c’est un produit qui s’épuise physiquement…

« Nous le voyons dans nos mines de nickel, qui nous laissent de grands trous là où il y avait avant beaucoup de minerai. La même chose arrive avec le pétrole ; on découvre de moins en moins de grands gisements. C’est une question à laquelle nous avons dû beaucoup penser.

« Il y avait, si j’ai bonne mémoire, environ trois mille sociétés qui disposaient elles-mêmes de leurs devises convertibles et décidaient assez librement de ce qu’elles faisaient de leur profits, si j’achète ceci ou cela, si je repeins l’immeuble, si j’achète une meilleure voiture pour remplacer la vieille bagnole… Nous nous sommes rendu compte que, dans les conditions de notre pays, il fallait supprimer tout ça…

« Il fallait tout simplement fermer des sucreries et nous allions nous engloutir dans la fosse de Bartlett. Le pays comptait de nombreux économistes, beaucoup, et je ne veux pas les critiquer, mais, avec la même franchise avec laquelle je parle des erreurs de la Révolution, je peux leur demander pourquoi nous n’avions pas découvert qu’il était impossible de maintenir cette production, alors qu’il y avait belle lurette que l’URSS avait disparu, que le pétrole valait quarante dollars le baril et que les cours du sucre étaient au plus bas. Comment n’avions-nous pas découvert qu’il fallait rationaliser cette industrie et qu’il était insensé de semer presque deux cent soixante-dix mille hectares de terre chaque année, en vue de quoi il fallait labourer avec des tracteurs et des charrues lourdes, semer une canne qu’il fallait ensuite nettoyer avec d’autres machines, fertiliser avec de coûteux engrais, ou des herbicides tout aussi coûteux, etc. ?

« …Il y avait belle lurette que l’URSS s’était effondrée, que nous nous étions retrouvés du jour au lendemain sans carburants, sans matières premières, sans aliments, sans articles d’hygiène, sans rien. Peut-être a-t-il fallu que ça nous arrive, peut-être a-t-il fallu que nous souffrions ce que nous avons souffert, tout en étant prêts à nous donner notre vie cent fois plutôt que livrer la patrie ou de livrer la Révolution

« Peut-être tout ça a-t-il été nécessaire, parce que nous avons commis de nombreuses erreurs, des erreurs que nous essayons de rectifier ou, si vous voulez, que nous sommes en train de rectifier.

« Écoutez bien : sans abus de pouvoir ! Rien ne justifierait jamais l’abus de pouvoir de la part de l’un d’entre nous. En revanche, nous devons oser, nous devons avoir le courage de dire la vérité. […] vous n’êtes pas obligés de les dire toutes à la fois. Les batailles politiques se livrent selon une tactique, selon des informations adéquates. […]  Peu importe ce que les bandits diront demain ou après-demain, ou alors les dépêches. Rira bien qui rira le dernier.

« Il n’est pas question d’imprimer des billets sans contrepartie en marchandises ou en services…

« Les appartements, nous en avons fini par en faire cadeau. Certains en sont devenus propriétaires en payant cinquante pesos par mois, ou quatre-vingts. Si l’argent leur arrivait de Miami, au change ça leur coûtait trois dollars ! D’autres les vendaient, à quinze ou vingt mille dollars, alors qu’ils ne leur avaient coûté en fin de compte que cinq cents.

« Le pays peut-il régler la question du logement en faisant cadeau des appartements ? Et qui en bénéficiait d’ailleurs, le prolétaire, les petits gens ? De fait, bien des petites gens qui avaient reçu un appartement quasiment donné le revendaient au nouveau riche. Combien le nouveau riche pouvait-il payer pour un appartement ? C’est du socialisme, ça ?

« Ça a pu être une nécessité à un moment donné, mais ça a pu être aussi une erreur. Le pays a reçu un coup dévastateur, quand la grande puissance s’est effondrée du jour au lendemain et nous a laissés seuls, absolument seuls, et que nous avons perdu tous les marchés de notre sucre et que nous avons cessé de recevoir des vivres, du carburant, et jusqu’au bois pour enterrer chrétiennement nos morts. Et tout le monde se disait : « Ça va s’effondrer. » Et une bonne quantité de crétins continuent d’ailleurs de croire que ça va s’effondrer, si non maintenant, du moins demain. Et plus ils se font des illusions, et plus nous devons, nous, réfléchir et plus nous devons tirer des conclusions, pour que la défaite ne soit jamais le lot de notre glorieux peuple qui nous a tant fait confiance à tous.

« …Que l’Empire ne vienne pas ici installer des prisons secrètes pour torturer les hommes et les femmes progressistes du reste du continent qui se dresse aujourd’hui décidé à atteindre son seconde et définitive indépendance !

Mieux vaut qu’il ne reste même pas l’ombre du souvenir d’aucun de nous et d’aucun de nos descendants plutôt que de recommencer à vivre une vie si répugnante et si misérable.

« Ils ont trompé leur monde. Ils ont profité des médias pour s’emparer des esprits et ils ont gouverné non seulement à coups de mensonges, mais encore de réflexes conditionnés. Un mensonge est une chose, un réflexe conditionné en est une autre : le mensonge trouble la connaissance ; le réflexe conditionné trouble la capacité de penser. Et ce n’est pas pareil d’être désinformé et d’avoir perdu la capacité de jugement parce qu’on vous a inculqué des réflexes : « Ceci est mauvais, ceci est mauvais ; le socialisme est mauvais, le communisme est mauvais », et tous les ignorants et tous les pauvres et tous les exploités ressassent : « Le communisme est mauvais. »

«" Cuba est mauvaise, Cuba est mauvaise", leur dit l’Empire. Il le leur dit à Genève, il le leur a dit à des tas d’endroits différents, et tous les exploités de ce monde, tous les analphabètes et tous ceux qui ne reçoivent pas de soins médicaux ni d’éducation, qui n’ont pas un emploi garanti, qui n’ont absolument rien de garanti, en fait, ressassent : "La Révolution cubaine est mauvaise, la Révolution cubaine est mauvaise."

« Est-ce la faute de l’analphabète ? Comment peut-il savoir si le Fonds monétaire est bon ou mauvais, ou alors que les intérêts sont plus élevés, ou que le monde est soumis à un pillage permanent à travers les milliers de méthodes de ce système-là ? Il ne le sait pas.

« Ce système-là n’apprend aux masses à lire et à écrire. Il est capable de dépenser un billion de dollars tous les ans en publicité. Et ce n’est pas seulement ce qu’il dépense, mais à quoi il le dépense : il le dépense à créer des réflexes conditionnés, pour que vous achetiez Palmolive, et l’autre Colgate et l’autre encore Cadum, tout simplement parce qu’on vous l’a répété cent fois, que vous l’a associé à une photo bien léchée, qu’on vous a fourré ça dans le crâne. Eux, qui parlent tant de lavage de cerveau, ce sont eux qui vous sculptent le cerveau, qui vous le modèlent, qui lui donnent une forme, qui vous enlèvent votre capacité de penser. Et encore sils enlevaient sa capacité de penser à quelqu’un qui sort d’une université et qui peut au moins lire un livre, ce serait moins grave.

« Mais l’analphabète, que peut-il donc lire ? Comment va-t-il savoir qu’on le berne ? Comment apprend-il que le plus gros mensonge de ce monde-ci, c’est de dire que c’est de la démocratie, le système pourri qui règne dans ce pays-là et dans la plus grande partie des autres pays qui l’ont copié ? […]C’est ce qui explique que vous pouvez finir par devenir au fil du temps bien plus révolutionnaire que vous l’étiez quand vous ignoriez bien de ces choses-là et que vous ne connaissiez que les facteurs de l’injustice et de l’inégalité.

« En vous disant tout ce que je vous dis, je ne fais pas de la théorie, même s’il le faut. Nous sommes en train d’agir, nous sommes en marche vers un changement total de notre société.

« Aujourd’hui, les cours du pétrole n’obéissent à aucune loi de l’offre et de la demande ; ils obéissent à d’autres facteurs, à la rareté, au gaspillage colossal des pays riches, sans le moindre rapport avec la moindre loi économique. Rareté face à une demande extraordinaire en augmentation constante.

« Nous invitons toute la population à coopérer à une grande bataille, qui n’est pas seulement celle du carburant et de l’électricité, mais celle contre tous les vols, de toute sorte, où que ce soit. Je le répète : contre tous les vols, de toute sorte, où que ce soit.

« Je n’ai rien contre personne en particulier, mais je n’ai rien non plus contre la vérité. Et que celui-ci qui se vexe parce que je dis la vérité, eh bien, qu’il se vexe ! Je suis désolé, mais je l’avertis d’avance qu’il va perdre la bataille, sans commettre la moindre injustice ou le moindre abus de pouvoir.

« […] Pour payer tes 300 kW, tu as dépensé 1,9 dollar, soit 0,63 centime de dollar par kilowatt d’électricité cubaine. Quelle merveille !

Le dollar en question, tu ne l’as pas gagné, ou alors le peso, en travaillant, […] Non, c’est un dollar qu’on t’a envoyé de là-bas, envoyé par quelqu’un qui est parti d’ici en bonne santé, qui n’a pas payé un sou pour faire toutes ses études, qui n’est pas malade, parce qu’il n’y pas d’émigrants en meilleurs santé que les émigrants cubains, qui bénéficient par ailleurs des avantages que leur offre la Loi d’ajustement cubain et qui n’ont pas non plus le droit d’envoyer de l’argent à leur famille.

« Bien entendu, tu n’as pas dépensé en médicaments un seul centime de ce dollar qu’on t’a envoyé, puisque les médicaments à l’hôpital ne coûtent rien; et si tu les as achetés dans une pharmacie – ceux qu’on n’a pas détournés pour les revendre ailleurs – comme ils sont subventionnés, ils ne t’ont coûté que 10 p. 100 de leur valeur en devises. Si on t’a hospitalisé et que, va savoir, on t’ait opéré du genou, ou même du cœur, tu n’as pas dépensé un sou, alors que ton opération aux USA peut valoir mille ou deux mille ou dix mille dollars. Si tu as un infarctus et qu’on te pose une valve, ce qui est arrivé à l’un des fonctionnaires de notre Section des intérêts à Washington, alors, tu vas devoir débourser quatre-vingt mille dollars. De toute façon, on n’a jamais cessé de te fournir des soins ; on a pu être plus ou moins aimable avec toi, mais en tout cas, est-ce qu’on t’a refusé quelquefois l’entrée dans un hôpital ?

            « Et un jour, […] la Révolution disposera des instruments développés par des techniques de pointe pour savoir où se trouve chaque camion, à quel endroit, dans quelle rue. Personne ne pourra plus disparaître pour aller voir sa tante ou sa petite amie. Non que ce soit mal d’aller voir sa famille, son ami ou sa fiancée ; ce qui est mal, c’est de le faire avec le camion destiné au travail…

« Nous devons rationaliser au maximum les salaires, les prix, les pensions et les retraites. Zéro gaspillage. […]  Nous ne sommes pas un pays capitaliste où tout est laissé au hasard.

« Subventions et gratuité, uniquement pour les choses essentielles, les choses vitales. […] Vous vous direz : avec quoi paierons-nous ces coûts ? […] Tout est à notre portée, tout appartient au peuple. La seule chose non permissible, c’est de gaspiller des richesses d’une manière égoïste et irresponsable.

« Je n’avais vraiment pas l’intention de me lancer dans une conférence sur des questions si sensibles, mais ç’aurait été un crime de laisser filer cette occasion de dire un certain nombre de choses relatives à l’économie, à la vie matérielle du pays, au sort de la Révolution, aux idées révolutionnaires, aux raisons pour lesquelles nous avons lancé cette bataille, à la force colossale que nous avons aujourd’hui, au pays que nous sommes aujourd’hui et que nous pouvons continuer d’être et que nous pouvons faire meilleur.

« Je vous ai parlé avec toute la confiance possible…

« Le pays aura bien plus, mais il ne sera jamais une société de consommation : il sera une société de connaissances, de culture, au développement humain le plus extraordinaire qu’on puisse concevoir, développement de la culture, des arts, de la science, […] doté d’une liberté pleine que personne ne pourra restreindre. Nous le savons, ce n’est même pas la peine de le proclamer, même s’il est bon de le rappeler.

« Personne ne doit avoir le droit de fabriquer des armes nucléaires. Encore moins le droit privilégié qu’a imposé l’impérialisme d’établir sa domination hégémonique et d’enlever aux peuples du tiers monde leurs ressources naturelles et leurs matières premières.

« C’en est assez de tant de crétinisme, de tant d’abus, de tant de règne de la force et de la terreur dans le monde. Ce règne disparaît face à l’absence totale de peur, et nous sommes toujours plus nombreux, comme peuples, à avoir toujours moins peur, les rebelles seront toujours plus nombreux et l’Empire ne pourra plus continuer de maintenir le système infâme qu’il soutient encore. 

« Il est tout à fait juste de lutter pour ça. Voilà pourquoi nous devons consacrer toutes nos énergies, tous nos efforts, tout notre temps à faire en sorte que des millions ou des centaines de millions ou des milliards de personnes puissent dire avec nous : Il vaut la peine d’être nés ! Il vaut la peine d’avoir vécu ! »

Voilà comment j’avais conclu ce discours, que je ratifie aujourd’hui de nouveau.

Je vous remercie.

17 novembre 2010

 

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16 novembre 2010 2 16 /11 /novembre /2010 00:02

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Quand un malade est très grave, s’il est catholique, il se confessera puis il recevra l’extrême-onction. C’est bien ce qui est arrivé à la crédibilité des États-Unis aux réunions quasiment simultanées du G-20 et de l’APEC. À partir de là, on ne sait pas ce qu’il va se passer. Peut-être donnera-t-on une sépulture chrétienne  – à moins qu’on ne les incinère – aux restes de l’absurde illusion consistant à croire qu’il est possible de maintenir un système social incompatible avec la vie de l’humanité, dont les membres se chiffrent déjà aujourd’hui, selon des calculs internationaux rigoureux, à 6 884 307 685 personnes et augmentent à raison d’un peu plus de 77 millions par an.

Quand on examine la liste des pays membres de l’APEC, on y trouve les États-Unis et le Japon, deux des nations les plus riches du monde ; le Canada, l’Australie, Singapour et la Corée du Sud, considérablement industrialisés ; la Russie, un puissant État aux grandes ressources naturelles, scientifiques et techniques ; puis un groupe de pays émergents parmi les plus importants, comme la Chine, l’Indonésie et d’autres de l’Asie du Sud-est baignés par l’Océan Pacifique, soit vingt et un pays qui se sont réunis au Japon, les 13 et 14 novembre, presque en simultané avec le G-20, dont neuf membres avaient d’ailleurs assisté à la rencontre de Séoul pour y discuter des problèmes les plus cruciaux. Tous les pays de ces deux instances sont capitalistes, sauf la Chine et le Vietnam dont les États-Unis ont tenté, à feu et à sang dans un cas, d’empêcher la transformation révolutionnaire.

La liste des membres de l’APEC comprend un État très pauvre qui n’a rien de commun avec les vingt autres : la Papouasie-Nouvelle-Guinée. J’ai cherché des renseignements sur ce pays, situé non loin de l’Australie, au nord.  MacArthur se retrouva dans sa capitale actuelle, Fort Moresby, en 1942, bien loin des Japonais, après que ceux-ci eurent envahi et occupé la principale base étasunienne de leur colonie des Philippines, située à Luzon, à quelques kilomètres de Manille.

Que sait-on de ce pays inscrit au dix-septième rang de la liste de l’APEC ? Ses premiers habitants, chasseurs-cueilleurs, y arrivèrent voilà quarante-cinq ou cinquante mille ans en provenance du Sud-est de l’Asie, durant la période glaciale du pléistocène. Une seconde vague de population y arriva plus de quarante mille ans après, vers 3 500 avant notre ère, dotée d’une culture plus avancée, puisqu’elle pratiquait l’horticulture et la pêche, qu’elle connaissait la navigation et qu’elle maîtrisait la technique de la poterie à la même époque où celle-ci se développait à Babylone.

Les Européens arrivèrent en Polynésie par l’est et par l’ouest cinq mille ans après : les Espagnols, les Portugais, les Anglais et les Hollandais la  conquirent, forts de leurs armes à feu et de leurs épées d’acier, la colonisèrent, s’emparèrent de ses ressources et réduisirent ses habitants à l’esclavage.

Tout en admettant qu’ils aient apporté des connaissances et des acquis de sociétés à plus grand développement culturel que celui des certaines communautés humaines qui habitaient des territoires isolés, baignés et séparés par les eaux du Pacifique, il faut dire qu’il existait dans une grande partie de l’Asie et du Moyen-Orient des civilisations bien supérieures à celles de l’Europe d’alors. Les conquérants imposèrent la force de leurs armes à des territoires comme la Chine, l’Inde et le Moyen-Orient, qui étaient déjà des berceaux de civilisations millénaires quand les tribus barbares se disputaient encore l’Europe.

Les puissances coloniales accordèrent l’indépendance à la Papouasie-Nouvelle-Guinée en septembre 1975.

Selon le recensement de 2000, elle comptait 5 190 800 habitants sur un territoire de 462 840 kilomètres carrés.

Malgré ses grandes ressources naturelles – le pétrole, le cuivre et l’or – qui constituent 80 p. 100 de ses exportations, la Papouasie-Nouvelle-Guinée est le pays où l’espérance de vie à la naissance est la plus basse au monde. Ses abondantes richesses halieutiques sont exploitées par des sociétés étrangères et souffrent beaucoup des changements climatiques provoqués par les courants marins du Pacifique. De 1995 à 1997, les productions de café, de cacao, de thé, de sucre et de noix de coco ont considérablement diminué à cause de la sécheresse.

C’est le pays qui compte le plus de langues au monde, 820, soit 12 p. 100 des 7 536 existantes selon les spécialistes. De nombreux villages possèdent la leur.

Non loin de là, on trouve la République démocratique de Timor-Leste, à l’histoire dramatique et héroïque. Le pays fut conquis en 1512 par les Portugais, en même temps que la Guinée-Bissau, les îles de Cap-Vert et de Sao-Tomé-et-Principe, l’Angola et le Mozambique, toutes colonies qui subirent le même sort qu’elle mais dont aucune ne vécut un destin si douloureux.

Quand la Révolution des œillets mit fin en 1974 à la tyrannie de Salazar au Portugal, un membre de l’OTAN  et un proche allié des États-Unis, le Front révolutionnaire de Timor-Leste déclara l’indépendance du pays le 29 novembre 1975, mais il ne put en jouir que neuf jours. Le 7 décembre, la tyrannie sanguinaire en place en Indonésie, celle de Suharto – qui, avec la complicité de la CIA, avait renversé le gouvernement constitutionnel de Sukarno, assassinant des centaines de milliers de communistes et de militants progressistes – dépêcha, avec l’accord de Washington, des troupes pour envahir ce pays. Et ce n’est qu’au terme de vingt-sept ans de lutte que son peuple put, sous la direction du FRETILIN, y réinstaller un gouvernement constitutionnel.

Je n’ai pas besoin d’expliquer les liens étroits qui unissent Cuba et les anciennes colonies portugaises. Notre combat contre les troupes du régime d’apartheid – auquel l’administration Reagan avait fourni des armes nucléaires stratégiques – donnent à notre pays l’autorité morale pour se prononcer sur les décisions de l’APEC à partir du moment où l’administration étasunienne impose des mesures qui touchent les intérêts de tous les pays, dont ceux des autres membres de cette organisation.

Elle a tenté d’obliger la Chine à réévaluer sa monnaie, le yuan (renminbi), sans tenir compte du fait que, depuis que ce pays a engagé sa politique de gestion monétaire en  juillet 2005, le yuan est passé de 8,28 pour un dollar à moins de 6,70 aujourd’hui.

Selon le Financial Times du 6 octobre, le Premier ministre chinois, en visite à Bruxelles, a affirmé que la réévaluation du yuan était en cours, mais que son pays se refusait à donner des garanties quant à la vitesse à laquelle elle se ferait. Et il a averti fermement : « N’exercez pas de pressions sur nous au sujet de la parité du renminbi. » Il a expliqué qu’une action précipitée en la matière pouvait entraîner la faillite de nombreuse entreprises chinoises qui travaillent à l’exportation et avoir de graves conséquences sur l’économie : « Si la Chine connaît des troubles économiques et sociaux, ce serait une catastrophe pour le monde. »

Il coule de source que tous les pays du Tiers-monde pour lesquels la Chine constitue un marché sûr pour leurs exportations – destinées à satisfaire les besoins d’une population qui, selon le dernier recensement de 2008, se montait à 1 324 655 000 habitants, soit presque un milliard de plus que les USA, et ceux d’une économie dont la croissance moyenne annuelle n’est pas inférieure à 10 p. 100 – en tireraient dès lors en échange moins de profits,  tandis que leurs exportations dans le reste du monde, payables en dollars, leur procureraient un papier-monnaie valant de moins en moins.

Les exportations étasuniennes sont constituées à 80 p. 100 de services, ceux de l’industrie dite des loisirs et bien d’autres qui ne satisfont pas les besoins vitaux de nos peuples, en premier lieu ceux du développement.

André Vltchek aborde des questions intéressantes dans un article sur Internet intitulé « L’Occident améliore ses techniques pour agresser la Chine » :

Les tactiques employées en leur temps – commencer par discréditer puis tenter de détruire tous les gouvernements ou mouvements communistes et socialistes, progressistes et nationalistes dont l’Union Soviétique, Cuba, le Nicaragua, la Corée du Nord, le Chili, la Tanzanie, et récemment le Venezuela – sont toujours considérées comme valables. Elles ont même été améliorées depuis (avec encore plus de moyens en personnel et en technologie… Après tout, l’objectif que s’est fixé l’Occident et sa dictature globale est de taille : la Chine - le pays le plus peuplé de la planète.

Le fait que la Chine soit un État historiquement pacifique et qui réussit dans de nombreux domaines rend la tâche plus difficile. […] Après tout, l’Occident est (indirectement) impliqué dans les massacres du Congo/RDC (où l’on compte au moins cinq millions de morts), dans la déstabilisation de toute la Corne de l’Afrique et de certaines parties de l’Amérique latine, ainsi que dans des guerres d’agression contre l’Irak et l’Afghanistan, pour ne citer que quelques-unes de ses aventures macabres.

[…]

« "Les gens voient de leurs propres yeux ce que la Chine est en train de faire", explique Mwandawiro Mghanga, ancien député du Kenya et membre de la Commission de Défense et des Relations internationales, poète et prisonnier politique sous le régime brutal pro-occidental de l’ancien dictateur Moi. "Si vous voyagez à travers le pays, vous verrez des Chinois en train de construire des routes et des bâtiments, des stades et des habitations, des projets qui sont excellents. […] Les gens voient ce que la Chine fait réellement et l’apprécient. Mais il y a une grande pression exercée sur le gouvernement kényan pour qu’il cesse sa coopération avec la Chine. En fait, il y a même une grande hostilité envers le Kenya – l’Occident nous punit à cause de nos relations étroites avec la RDC." »

Le Sommet annuel de l’APEC s’est ouvert hier à Yokohama.

Des forums plus réduits s’y déroulent, tel le Trans-Pacific Partnership Agreement (TPP), un traité de libre-échange limité à Brunei, au Chili, à la Nouvelle-Zélande et à Singapour, que veulent rejoindre les USA, l’Australie, le Pérou, la Malaisie et le Vietnam.  Bref, tout ce qui sert à vendre quelque chose. Du marché, encore du marché, toujours du marché !

Obama, tel un roi mage, distribue des sièges au Conseil de sécurité des Nations Unies, comme si celui-ci lui appartenait. Selon des agences de presse européennes, « il a signalé ce samedi que le Japon était un pays modèle qui devrait occuper un siège permanent… » Auparavant, devant le parlement de New-Delhi, il avait affirmé que son administration « appuierait l’entrée éventuelle de l’Inde ». Bien entendu, le Pakistan s’est plaint amèrement de cette promesse yankee. Ce qu’Obama n’a pas précisé, c’est si ledit siège était assorti ou non du droit de veto, comme si ce privilège antidémocratique devait être éternel.

On ignore s’il a fait une offre aussi généreuse à Lula, bien que plus d’un demi-milliard de Latino-Américains et presque un milliard d’Africains n’aient pas de représentation permanente au Conseil de sécurité. Combien de temps pense-t-il encore manipuler le monde de la sorte ? Mais je me trompe peut-être et sous-estime Obama : en pleine euphorie, apportera-t-il l’aval des USA à tous les aspirants ?

Comme de juste, les réunions du G-20 et de l’APEC se sont bien terminées, comme dans ces westerns d’Hollywood que je voyais quand j’étais lycéen. La Déclaration finale du Sommet de l’APEC, du bla-bla-bla, mériterait un Oscar : « Vision de Yokohama », l’a qualifiée le Premier ministre japonais…

Le président chinois Hu Jintao, selon une information plus sérieuse d’une agence de presse étasunienne, a toutefois déclaré : « La relance n’est pas solide et les déficits causent une grande incertitude. […] La situation de l’emploi dans les pays développés est sombre et les marchés émergents font face à des pressions inflationnistes et à des bulles des cours des actifs. »

Une agence européenne, généralement sérieuse, précise : « Le président chinois Hu Jintao, a dit que son pays n’accepterait pas de pressions extérieures visant à le faire changer de politique. »

Obama a conclu sa tournée asiatique, après la réunion, par « une visite du Grand Bouddha de Kamakura – une statue de bronze de treize mètres de haut pesant quatre-vingt-treize tonnes, érigée en 1252 – en position du lotus. »

De son côté, le général David Richards, le chef des forces armées britanniques, a affirmé qu’Al-Qaeda – ce qui revient à qualifier d’une manière erronée la résistance afghane, véritable fer de lance de la lutte contre l’OTAN, et n’ayant rien à voir avec les forces que la CIA avait créées pour lutter contre les troupes soviétiques – ne peut être vaincu et que « le Royaume-Uni devait être prêt à faire face à la menace d’attentats islamistes pendant les trente prochaines années au moins.

« Dans une interview au journal britannique The Sunday Telegraph, le général Richards a déclaré que son pays devrait s’attacher à endiguer la menace qui pèse sur ses citoyens, ce qui était possible, au lieu de s’efforcer de vaincre les militants islamistes.

« "Dans la guerre classique, la victoire et la défaite sont claires et ont pour symbole le défilé de vos troupes dans la capitale de l’ennemi."

« "Nous devons d’abord nous demander : avons-nous besoin d’obtenir sur eux une victoire claire ? Non, c’est inutile, et nous n’y parviendrons jamais. Pouvons-nous endiguer cette menace de façon que nos vies et celles de nos enfants soient sûres ? Je crois que nous le pouvons".

« Selon Richards, les vraies armes dans la guerre contre Al-Qaeda sont l’éducation et la démocratie.

« D’après lui, l’armée et le gouvernement britanniques sont "coupables de ne pas comprendre complètement ce qui est en jeu" en Afghanistan, tandis que les Afghans commencent à "se lasser" de l’incapacité de l’OTAN à tenir ses promesses. 

« Selon le journaliste de la BBC, Frank Gardner, les commentaires du général Richards traduisent "un nouveau réalisme" dans les milieux antiterroristes du Royaume-Uni et des États-Unis. S’il avait dit des choses pareilles voilà cinq ans, ses affirmations auraient fait scandale parce que défaitistes. »

Obama a bien raison de visiter le Grand Bouddha de Kamakura, maintenant que la droite fasciste gagne rapidement du terrain dans l’Europe des courants réformistes, dont la Suède, et dans la société de consommation yankee, où trop de gens sont des ignares qui croient que la justice sociale, la santé, l’éducation, la solidarité et la paix sont des trucs des communistes !  Einstein, qui avait souhaité que les États-Unis antifascistes de Franklin D. Roosevelt se dotent de la bombe atomique avant que l’Allemagne nazie ne parvienne à la mettre au point, n’aurait jamais pu s’imaginer que, plusieurs décennies après, le danger serait qu’une extrême droite fasciste prenne le pouvoir aux USA.

 

Fidel Castro Ruz

Le 14 novembre 2010

19 h 58

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